Perspective d’Ostbelgien: faut-il aussi légaliser le cannabis en Belgique?
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- News link: https://daardaar.be/rubriques/societe/perspective-dostbelgien-faut-il-aussi-legaliser-le-cannabis-en-belgique/
- Source link: https://www.grenzecho.net/121507/artikel/2025-04-09/sollte-cannabis-auch-belgien-legalisiert-werden
Pour – Maxime Ortmans :
Être le premier pays à légaliser le cannabis n’est pas évident. C’est une démarche politiquement délicate, socialement controversée et semée d’embûches, tout comme la question elle-même. Par chance, le gouvernement fédéral belge n’a plus à franchir ce premier pas, puisque d’autres pays plus courageux l’ont fait avant lui. Le Canada, l’Uruguay et le Portugal ont ouvert la voie il y a plusieurs années, le Luxembourg et l’Allemagne leur ont ensuite emboîté le pas. Le terrain est défriché, les expériences sont là. Il est grand temps d’en tirer les enseignements. Car chez nous, le marché noir prospère et la consommation est une réalité depuis longtemps, mais tout cela se fait de manière incontrôlée et potentiellement dangereuse.
Aujourd’hui, les utilisateurs de cannabis ignorent la composition exacte de ce qu’ils consomment. Et pendant ce temps, les ventes alimentent directement les dealers et les organisations criminelles. Un marché sous contrôle ne serait pas un blanc-seing, mais un mécanisme de protection assorti de limites d’âge, de normes de qualité et de règles claires. D’un point de vue économique, il est également intéressant d’observer ce qui se passe au-delà les frontières. Pendant que la police et la justice belges se préoccupent de délits mineurs, l’État perd des millions chaque année. Au Canada et dans plusieurs États américains où les marchés sont régulés, l’expérience montre que régulation et recettes fiscales font bon ménage. Les fonds investis aujourd’hui dans une répression inutile pourraient être alloués demain à la sensibilisation, à la prévention et à l’aide aux toxicomanes. Et au niveau sociétal ? Là aussi, les expériences à l’étranger sont parlantes : la légalisation n’est pas nécessairement source de problèmes supplémentaires. En Uruguay, la consommation chez les jeunes est restée stable. Dans les États américains du Colorado et de Washington, elle n’a pas augmenté non plus, surtout chez les jeunes. Celui qui veut fumer du cannabis en fumera. L’ignorer ne favorise ni le contrôle ni la protection. Il ne faut pas voir en la légalisation une invitation à consommer, mais plutôt un aveu d’échec : la politique menée jusqu’ici en matière de drogues a échoué. Le gouvernement fédéral belge n’a pas besoin d’être courageux sur cette question, il doit juste être raisonnable. Il est temps.
A relire (archive de 2015)
[1]Cannabis: De Block ouvre la boîte de Pandore
Contre – Christian Schmitz :
Un an après la légalisation partielle du cannabis en Allemagne, l’heure est au premier bilan. Et force est de constater que le marché noir ne s’est pas tari. C’était pourtant l’un des arguments majeurs en faveur de cette mesure. Selon le ministère de l’Intérieur de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, les associations de cultivateurs et les cultivateurs privés ne parviennent pas à couvrir la demande considérable. Le cannabis illégal continue donc à dominer le marché. De plus, la nouvelle limite de possession passée à 25 grammes complique la tâche des autorités en matière de poursuites pénales : les dealers peuvent librement se déplacer dans les lieux publics et même des ventes à répétition ne constituent pas souvent un début de soupçon. Le marché noir est dopé par la faiblesse des sanctions, la forte demande et la baisse du seuil d’inhibition. Tout cela alors que l’on nous promettait une décriminalisation.
Mais au-delà des statistiques de criminalité, le débat porte aussi sur les risques pour la santé, notamment celle des jeunes. Le cannabis n’est pas une drogue récréative inoffensive, comme on se plait à la présenter. Sa consommation peut avoir de lourdes conséquences, surtout chez les jeunes, dont le cerveau est encore en développement. Des études montrent que fumer du cannabis à un âge précoce, à partir de 14 ou 15 ans par exemple, augmente le risque de développer des troubles psychiques comme la dépression ou la psychose. Les troubles de la concentration et l’apathie sont aussi des effets fréquents. Et selon les recherches, plus les jeunes commencent tôt, plus ils risquent de passer à des drogues plus dures par la suite. Par ailleurs, la distinction entre drogues « dures » et « douces » omet une chose : l’effet sur le cerveau des jeunes ne s’arrête pas aux contours de la classification politique, il relève de la biologie. La légalisation a également une incidence sociale non négligeable : autoriser une drogue, c’est envoyer un signal d’acceptation. Or, ce dont nous avons besoin c’est d’une politique cohérente en la matière : avec un positionnement clair, une meilleure information et une aide accrue aux jeunes à risque.
A relire
[2]Les trafiquants de drogue font main basse sur l’Europe tout entière
[1] https://daardaar.be/rubriques/opinions/le-cannabis-medical/
[2] https://daardaar.be/rubriques/societe/les-trafiquants-de-drogue-font-main-basse-sur-leurope-tout-entiere/