L’intelligence artificielle peut-elle (déjà) vous faire gagner de l’argent ?
([Economie] 2024-10-01 (Het Nieuwsblad))
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- News link: https://daardaar.be/rubriques/economie/lintelligence-artificielle-peut-elle-deja-vous-faire-gagner-de-largent/
- Source link: https://www.nieuwsblad.be/cnt/dmf20241022_94992531
Vers qui vous tourner pour placer vos précieux deniers, fruit de votre dur labeur ? Vous pouvez vous amuser à décortiquer des rapports annuels, scruter des graphiques boursiers à la loupe ou demander l’avis d’un spécialiste. Les experts sont d’ailleurs légion. Ils travaillent pour votre banque, sont membres de clubs privés ou conseillers personnels. Ils font valoir leur bon sens, leur expérience et leurs compétences.
Mais sachez que vous pouvez également vous en remettre à l’intelligence artificielle. De nombreuses applications et sites web proposent des systèmes qui vous fournissent des conseils d’investissement basés sur l’IA. La logique est la suivante : un « robot » peut analyser beaucoup plus de données et interpréter quantités de schémas sans préjugés ni la moindre émotion, ce qui permettrait d’obtenir de meilleurs résultats, pour le plus grand bonheur de votre portefeuille.
Mais est-ce vraiment le cas ? Pour en avoir le cœur net, nous avons confié une somme fictive de 10 000 euros à Danny Reweghs, éminent conseiller en investissement et directeur de la stratégie chez Trends Beleggen , afin de les investir dans dix actions. Objectif : obtenir le plus de rendement possible sur un an.
Dans le même temps, nous avons cherché des outils en ligne offrant également des conseils d’investissement basés sur l’intelligence artificielle. Danelfin est une entreprise technologique espagnole, désormais « concurrente » de Danny Reweghs, qui a récemment levé deux millions d’euros de capital-risque. Elle s’appuie sur le potentiel de l’IA pour faire du « stock picking », c’est-à-dire pour choisir des actions. Danelfin attribue un « score IA » à chaque action. Plus ce score est élevé, plus la société pense que le cours de l’action est susceptible de décoller.
Place au bilan. Une fois l’année écoulée, nous avons pu comparer les résultats obtenus par l’homme et la machine. Les actions de Danny Reweghs ont augmenté de 6,29 %. Un pourcentage supérieur à l’inflation et au taux d’intérêt d’un compte épargne. Toujours plus intéressant, également, que ce qu’aurait rapporté des obligations d’État.
Reste que les dix actions sélectionnées par Danelfin ont généré un rendement total de plus de 21 %. Interpellant. Il convient de noter que ce n’était qu’un simple « jeu » non scientifique, sans argent réel utilisé. Cette analyse ne constitue en aucun cas un conseil d’investissement, et n’offre aucune garantie. Les résultats sont donc à prendre avec pincettes.
Tomás Diago, fondateur de Danelfin, se dit « heureux, pas mais pas surpris ». « C’était en quelque sorte prévisible, car notre système a une plus grande capacité de calcul qu’un humain dans ses analyses. » La technologie passe 10 000 paramètres au crible, y compris des données
objectives comme les performances boursières passées ou les chiffres des rapports annuels, mais aussi des données « subjectives » comme la confiance des consommateurs. À la lumière de tous ces éléments, le système effectue diverses évaluations pour tenter de prédire le cours d’une action. Le fruit de ces analyses aboutit à un score IA. Plus ce score est élevé, plus Danelfin est « convaincu » que l’action fera mieux que la moyenne du marché.
L’application Danelfin n’est cependant pas gratuite : un abonnement « premium » coûte 65 euros par mois. « Nous avons 80 000 utilisateurs, mais la majorité utilise la version gratuite », précise Tomás Diago. En septembre 2023, nous avons ainsi gratuitement jeté notre dévolu sur
dix actions jugées prometteuses par l’IA de Danelfin. Le pari s’est avéré payant. L’application a sélectionné de nombreuses banques telles que Caixabank, Commerzbank et Standard Chartered.
Un choix judicieux, reconnaît Danny Reweghs. « Durant cette période, les taux d’intérêt étaient élevés, ce qui était favorable aux banques », indique-t-il. « J’avais tablé sur une baisse anticipée des taux, ce qui aurait pu affecter négativement les actions bancaires. Le système d’IA de Danelfin a opté pour une autre stratégie, et elle a porté ses fruits. Ceci dit, je serais curieux de revoir les résultats dans six mois, car je pense que les marges élevées sur les taux d’intérêt touchent à leur fin. »
[1]Forcer les banques à augmenter la rémunération de l’épargne? Attention, jeu dangereux!
L’action de Mosaic, un producteur d’engrais, n’a pas non plus atteint la valeur escomptée. « La faute à des conditions météorologiques défavorables », déplore Danny Reweghs. « Je pense qu’à terme, cette action finira par prendre de la valeur. J’ai également investi dans quelques actions immobilières dont j’attends de meilleures performances, notamment en raison de la baisse des taux d’intérêt. »
Il estime que l’IA a fait des choix « drastiques ». « Quant à moi, j’ai essayé de diversifier et de répartir les risques. Le système d’IA a fait des paris plus tranchés. En l’occurrence, cette approche était la bonne, mais elle n’est pas toujours gage de réussite pour autant. »
Comment Danny Reweghs voit-il l’avenir ? « Je pense que l’IA va continuer de se frayer un chemin dans toutes les strates du secteur financier, bien que son fonctionnement demeure souvent opaque. Beaucoup de ces applications se retranchent derrière le secret commercial afin de ne pas avoir à fournir trop d’informations détaillées. Ce sont des boîtes noires dont on ignore les rouages. »
C’est justement cette opacité qui explique pourquoi nous n’avons pas encore pleinement confiance en l’IA, selon l’économiste Gertjan Verdickt. Ce dernier, professeur d’économie financière à l’université d’Auckland, en Nouvelle-Zélande, a mené des recherches spécifiques sur l’IA en tant que conseiller en investissement. « Diverses études montrent que l’intelligence artificielle fait souvent de meilleures prévisions que les conseillers humains. Mais dans notre étude menée auprès de 3 600 investisseurs, il apparaît qu’ils demeurent méfiants à l’égard de l’IA, préférant se fier à des conseillers humains qui, objectivement, s’avèrent bien souvent moins efficaces. Mais lorsqu’un humain fait une prédiction, il peut justifier son raisonnement. Un système d’IA ultra-sophistiqué, en revanche, n’en est pas capable. »
Il ressort de l’étude de Gertjan Verdickt que plus un investisseur maîtrise l’IA, plus il aura tendance à s’y fier au moment d’investir. « On assiste à une fracture. Beaucoup d’investisseurs ne font pas le bon choix, soit par ignorance, soit par aversion pour les algorithmes.
« Les banques et les régulateurs du secteur financier devraient offrir plus de clarté et de transparence sur l’IA, ainsi que des explications quant à son fonctionnement », estime-t-il. Ainsi, tout un chacun pourrait agir en connaissance de cause. « Et il faut aussi plus de réglementation, tâche qui incombe à la FSMA (Autorité de contrôle qui régule le secteur financier en Belgique, ndlr). Actuellement, les conseils basés sur l’IA sont encore des produits de niche. Force est de constater qu’ils restent peu utilisés à grande échelle. Mais ce n’est sans doute qu’une question de temps. »
[2]Budget: la Flandre doit désormais prouver que ce qu’elle fait seule, elle le fait mieux
[1] https://daardaar.be/rubriques/economie/forcer-les-banques-a-augmenter-la-remuneration-de-lepargne-attention-jeu-dangereux/
[2] https://daardaar.be/rubriques/economie/budget-la-flandre-doit-desormais-prouver-que-ce-quelle-fait-seule-elle-le-fait-mieux/
Mais sachez que vous pouvez également vous en remettre à l’intelligence artificielle. De nombreuses applications et sites web proposent des systèmes qui vous fournissent des conseils d’investissement basés sur l’IA. La logique est la suivante : un « robot » peut analyser beaucoup plus de données et interpréter quantités de schémas sans préjugés ni la moindre émotion, ce qui permettrait d’obtenir de meilleurs résultats, pour le plus grand bonheur de votre portefeuille.
Score de l’IA
Mais est-ce vraiment le cas ? Pour en avoir le cœur net, nous avons confié une somme fictive de 10 000 euros à Danny Reweghs, éminent conseiller en investissement et directeur de la stratégie chez Trends Beleggen , afin de les investir dans dix actions. Objectif : obtenir le plus de rendement possible sur un an.
Dans le même temps, nous avons cherché des outils en ligne offrant également des conseils d’investissement basés sur l’intelligence artificielle. Danelfin est une entreprise technologique espagnole, désormais « concurrente » de Danny Reweghs, qui a récemment levé deux millions d’euros de capital-risque. Elle s’appuie sur le potentiel de l’IA pour faire du « stock picking », c’est-à-dire pour choisir des actions. Danelfin attribue un « score IA » à chaque action. Plus ce score est élevé, plus la société pense que le cours de l’action est susceptible de décoller.
Place au bilan. Une fois l’année écoulée, nous avons pu comparer les résultats obtenus par l’homme et la machine. Les actions de Danny Reweghs ont augmenté de 6,29 %. Un pourcentage supérieur à l’inflation et au taux d’intérêt d’un compte épargne. Toujours plus intéressant, également, que ce qu’aurait rapporté des obligations d’État.
Capacité de calcul
Reste que les dix actions sélectionnées par Danelfin ont généré un rendement total de plus de 21 %. Interpellant. Il convient de noter que ce n’était qu’un simple « jeu » non scientifique, sans argent réel utilisé. Cette analyse ne constitue en aucun cas un conseil d’investissement, et n’offre aucune garantie. Les résultats sont donc à prendre avec pincettes.
Tomás Diago, fondateur de Danelfin, se dit « heureux, pas mais pas surpris ». « C’était en quelque sorte prévisible, car notre système a une plus grande capacité de calcul qu’un humain dans ses analyses. » La technologie passe 10 000 paramètres au crible, y compris des données
objectives comme les performances boursières passées ou les chiffres des rapports annuels, mais aussi des données « subjectives » comme la confiance des consommateurs. À la lumière de tous ces éléments, le système effectue diverses évaluations pour tenter de prédire le cours d’une action. Le fruit de ces analyses aboutit à un score IA. Plus ce score est élevé, plus Danelfin est « convaincu » que l’action fera mieux que la moyenne du marché.
Taux d’intérêt élevés
L’application Danelfin n’est cependant pas gratuite : un abonnement « premium » coûte 65 euros par mois. « Nous avons 80 000 utilisateurs, mais la majorité utilise la version gratuite », précise Tomás Diago. En septembre 2023, nous avons ainsi gratuitement jeté notre dévolu sur
dix actions jugées prometteuses par l’IA de Danelfin. Le pari s’est avéré payant. L’application a sélectionné de nombreuses banques telles que Caixabank, Commerzbank et Standard Chartered.
Un choix judicieux, reconnaît Danny Reweghs. « Durant cette période, les taux d’intérêt étaient élevés, ce qui était favorable aux banques », indique-t-il. « J’avais tablé sur une baisse anticipée des taux, ce qui aurait pu affecter négativement les actions bancaires. Le système d’IA de Danelfin a opté pour une autre stratégie, et elle a porté ses fruits. Ceci dit, je serais curieux de revoir les résultats dans six mois, car je pense que les marges élevées sur les taux d’intérêt touchent à leur fin. »
[1]Forcer les banques à augmenter la rémunération de l’épargne? Attention, jeu dangereux!
Engrais
L’action de Mosaic, un producteur d’engrais, n’a pas non plus atteint la valeur escomptée. « La faute à des conditions météorologiques défavorables », déplore Danny Reweghs. « Je pense qu’à terme, cette action finira par prendre de la valeur. J’ai également investi dans quelques actions immobilières dont j’attends de meilleures performances, notamment en raison de la baisse des taux d’intérêt. »
Il estime que l’IA a fait des choix « drastiques ». « Quant à moi, j’ai essayé de diversifier et de répartir les risques. Le système d’IA a fait des paris plus tranchés. En l’occurrence, cette approche était la bonne, mais elle n’est pas toujours gage de réussite pour autant. »
Comment Danny Reweghs voit-il l’avenir ? « Je pense que l’IA va continuer de se frayer un chemin dans toutes les strates du secteur financier, bien que son fonctionnement demeure souvent opaque. Beaucoup de ces applications se retranchent derrière le secret commercial afin de ne pas avoir à fournir trop d’informations détaillées. Ce sont des boîtes noires dont on ignore les rouages. »
C’est justement cette opacité qui explique pourquoi nous n’avons pas encore pleinement confiance en l’IA, selon l’économiste Gertjan Verdickt. Ce dernier, professeur d’économie financière à l’université d’Auckland, en Nouvelle-Zélande, a mené des recherches spécifiques sur l’IA en tant que conseiller en investissement. « Diverses études montrent que l’intelligence artificielle fait souvent de meilleures prévisions que les conseillers humains. Mais dans notre étude menée auprès de 3 600 investisseurs, il apparaît qu’ils demeurent méfiants à l’égard de l’IA, préférant se fier à des conseillers humains qui, objectivement, s’avèrent bien souvent moins efficaces. Mais lorsqu’un humain fait une prédiction, il peut justifier son raisonnement. Un système d’IA ultra-sophistiqué, en revanche, n’en est pas capable. »
Plus de transparence
Il ressort de l’étude de Gertjan Verdickt que plus un investisseur maîtrise l’IA, plus il aura tendance à s’y fier au moment d’investir. « On assiste à une fracture. Beaucoup d’investisseurs ne font pas le bon choix, soit par ignorance, soit par aversion pour les algorithmes.
« Les banques et les régulateurs du secteur financier devraient offrir plus de clarté et de transparence sur l’IA, ainsi que des explications quant à son fonctionnement », estime-t-il. Ainsi, tout un chacun pourrait agir en connaissance de cause. « Et il faut aussi plus de réglementation, tâche qui incombe à la FSMA (Autorité de contrôle qui régule le secteur financier en Belgique, ndlr). Actuellement, les conseils basés sur l’IA sont encore des produits de niche. Force est de constater qu’ils restent peu utilisés à grande échelle. Mais ce n’est sans doute qu’une question de temps. »
[2]Budget: la Flandre doit désormais prouver que ce qu’elle fait seule, elle le fait mieux
[1] https://daardaar.be/rubriques/economie/forcer-les-banques-a-augmenter-la-remuneration-de-lepargne-attention-jeu-dangereux/
[2] https://daardaar.be/rubriques/economie/budget-la-flandre-doit-desormais-prouver-que-ce-quelle-fait-seule-elle-le-fait-mieux/