Pourquoi les Flamands ont tendance à ne pas saluer les inconnus
([Culture et Médias] 2024-09-01 (De Standaard))
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Avec le retour des premiers vacanciers, vous avez sans doute entendu l’un d’eux s’exclamer : « Là-bas, les gens se disent encore bonjour ! » Un cliché, certes, mais qui révèle néanmoins un peu de l’âme du peuple flamand. En effet, attendre du Flamand moyen qu’il salue un inconnu, c’est comme demander à un Français de rester humble lorsque son équipe remporte un match de foot : tout sauf « simple comme bonjour ». Professeur d’université installé dans les Ardennes flamandes depuis quinze ans et fan de cyclisme à ses heures perdues, Jamie Anderson se rend compte, au détour d’une conversation avec un couple de Danois, que ceux-ci trouvent « dingue » que les cyclotouristes flamands se saluent si peu. « La Flandre fait figure d’exception. De l’autre côté de la frontière, au Pays des Collines, en Wallonie, on me dit systématiquement bonjour. »
En 2016, le spécialiste de la communication Fons Van Dyck a poussé un coup de gueule en lançant la campagne « Zeg maar goeiendag » (« Dites bonjour »), qui visait à encourager les gens à se saluer plus souvent, qu’il s’agisse d’inconnus dans la rue et dans le bus ou de collègues au bureau ou à l’entrepôt. « C’était une réaction à l’angoisse qui s’était insinuée dans la société après les attentats de Bruxelles », nous explique-t-il au téléphone. Les recherches menées dans le cadre de cette campagne ont permis de dégager trois catégories de Flamands. « D’abord, ceux qui disent toujours bonjour, que ce soit à la boulangerie ou en balade. Ensuite, ceux qui ne saluent jamais personne. Enfin, ceux qui répondent à un salut lorsque c’est l’autre qui fait le premier pas. »
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Le spécialiste pense que les personnes qui appartiennent à ce dernier groupe changent de comportement lorsqu’elles voyagent. « A fortiori dans les pays du sud et en Scandinavie, dont les sociétés sont plus axées sur le collectif qu’en Flandre. » Une analyse que partage Alain Van Hiel, spécialiste de la psychologie sociale à l’Université de Gand. « Lorsque les normes sont solidement installées, presque tout le monde s’y conforme. Si personne ne dit bonjour ou ne répond à un salut, même le plus grand des extravertis finit par abandonner. En Flandre, ne pas saluer les inconnus ne fait donc pas forcément de vous un ours bourru. Dans beaucoup de situations, les gens n’en ont tout simplement pas l’habitude. »
« En Flandre, ne pas saluer les inconnus ne fait donc pas forcément de vous un ours bourru. »
Dans les situations dites « de faiblesse », celles où les conventions sociales sont moins évidentes, c’est le caractère individuel qui prend le pas dans les interactions avec les autres. Fons Van Dyck, par exemple, salue toujours les gens d’un signe de tête ou d’un bonjour. « Je tiens ça de ma mère, que j’entendais toujours dire bonjour à tout le monde lorsque j’étais à l’arrière de son vélo. » Il pouffe de rire : « Il se trouve que je porte une chemise orange aujourd’hui, et j’ai remarqué que les touristes néerlandais répondent à mes saluts avec encore plus d’amabilité que d’habitude. Il faut dire que l’identification et l’appartenance à un même groupe pèsent lourd dans l’équation. Que l’on pense aux motards qui lèvent le pied droit quand ils se dépassent ou aux appels de phare des routiers. »
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Mais à quel point le facteur « vacances » est-il déterminant ? La détente ne nous pousse-t-elle pas davantage à souhaiter une bonne journée aux autres ? Il ne faut pas le surestimer, répond Alain Van Hiel sur la base d’une étude de 2001 dont il ressort que les habitants des villes du sud sont plus enclins à venir en aide aux inconnus. « Leur rythme de vie prétendument plus lent n’y est pour rien. » Fons Van Dyck examine les choses par l’autre bout de la lorgnette. Il estime que chaque bonjour rend la société un peu meilleure et moins polarisée. « Le fait de regarder un inconnu dans les yeux pendant quatre minutes déclenche une réaction chimique qui tend à traiter l’autre avec plus de bienveillance. Dans mon livre, De toekomst is terug , j’érige ainsi l’échange de banalités en rempart contre la sinistrose et le pessimisme. »
« Le fait de regarder un inconnu dans les yeux pendant quatre minutes déclenche une réaction chimique qui tend à traiter l’autre avec plus de bienveillance. »
Pour sa part, Alain Van Hiel, dont les publications portent notamment sur le racisme et la polarisation politique, craint qu’il faille bien plus que quelques paroles réconfortantes. « Il faudrait déjà se montrer un peu plus affable en politique, par exemple. Mais il ne faut pas surestimer le pouvoir des conversations à la machine à café : la pandémie de COVID-19 nous l’a bien montré. » Il cite l’exemple des Américains, qui, aux yeux des Européens, se distinguent par leur amabilité théâtrale lors d’une première rencontre ou d’échanges brefs. « Nous trouvons que c’est superficiel, parce que dans notre culture, nous sous-estimons l’effet que peut avoir sur nous-mêmes le comportement que nous adoptons à l’égard des autres. Se montrer aimable, dire bonjour aux inconnus, etc. : ce sont des solutions simples quand on cherche à se sentir mieux dans sa peau. »
[3]Travailler avec des Wallons : ce que les Flamands doivent savoir
[1] https://daardaar.be/apprenez-le-neerlandais/awel-awel-le-nouveau-site-pour-apprendre-le-neerlandais-en-ligne/
[2] https://daardaar.be/formations/
[3] https://daardaar.be/rubriques/societe/travailler-wallons-flamands-doivent-savoir/
En 2016, le spécialiste de la communication Fons Van Dyck a poussé un coup de gueule en lançant la campagne « Zeg maar goeiendag » (« Dites bonjour »), qui visait à encourager les gens à se saluer plus souvent, qu’il s’agisse d’inconnus dans la rue et dans le bus ou de collègues au bureau ou à l’entrepôt. « C’était une réaction à l’angoisse qui s’était insinuée dans la société après les attentats de Bruxelles », nous explique-t-il au téléphone. Les recherches menées dans le cadre de cette campagne ont permis de dégager trois catégories de Flamands. « D’abord, ceux qui disent toujours bonjour, que ce soit à la boulangerie ou en balade. Ensuite, ceux qui ne saluent jamais personne. Enfin, ceux qui répondent à un salut lorsque c’est l’autre qui fait le premier pas. »
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Phénomène d’identification
Le spécialiste pense que les personnes qui appartiennent à ce dernier groupe changent de comportement lorsqu’elles voyagent. « A fortiori dans les pays du sud et en Scandinavie, dont les sociétés sont plus axées sur le collectif qu’en Flandre. » Une analyse que partage Alain Van Hiel, spécialiste de la psychologie sociale à l’Université de Gand. « Lorsque les normes sont solidement installées, presque tout le monde s’y conforme. Si personne ne dit bonjour ou ne répond à un salut, même le plus grand des extravertis finit par abandonner. En Flandre, ne pas saluer les inconnus ne fait donc pas forcément de vous un ours bourru. Dans beaucoup de situations, les gens n’en ont tout simplement pas l’habitude. »
« En Flandre, ne pas saluer les inconnus ne fait donc pas forcément de vous un ours bourru. »
Dans les situations dites « de faiblesse », celles où les conventions sociales sont moins évidentes, c’est le caractère individuel qui prend le pas dans les interactions avec les autres. Fons Van Dyck, par exemple, salue toujours les gens d’un signe de tête ou d’un bonjour. « Je tiens ça de ma mère, que j’entendais toujours dire bonjour à tout le monde lorsque j’étais à l’arrière de son vélo. » Il pouffe de rire : « Il se trouve que je porte une chemise orange aujourd’hui, et j’ai remarqué que les touristes néerlandais répondent à mes saluts avec encore plus d’amabilité que d’habitude. Il faut dire que l’identification et l’appartenance à un même groupe pèsent lourd dans l’équation. Que l’on pense aux motards qui lèvent le pied droit quand ils se dépassent ou aux appels de phare des routiers. »
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Échanges de banalités
Mais à quel point le facteur « vacances » est-il déterminant ? La détente ne nous pousse-t-elle pas davantage à souhaiter une bonne journée aux autres ? Il ne faut pas le surestimer, répond Alain Van Hiel sur la base d’une étude de 2001 dont il ressort que les habitants des villes du sud sont plus enclins à venir en aide aux inconnus. « Leur rythme de vie prétendument plus lent n’y est pour rien. » Fons Van Dyck examine les choses par l’autre bout de la lorgnette. Il estime que chaque bonjour rend la société un peu meilleure et moins polarisée. « Le fait de regarder un inconnu dans les yeux pendant quatre minutes déclenche une réaction chimique qui tend à traiter l’autre avec plus de bienveillance. Dans mon livre, De toekomst is terug , j’érige ainsi l’échange de banalités en rempart contre la sinistrose et le pessimisme. »
« Le fait de regarder un inconnu dans les yeux pendant quatre minutes déclenche une réaction chimique qui tend à traiter l’autre avec plus de bienveillance. »
Pour sa part, Alain Van Hiel, dont les publications portent notamment sur le racisme et la polarisation politique, craint qu’il faille bien plus que quelques paroles réconfortantes. « Il faudrait déjà se montrer un peu plus affable en politique, par exemple. Mais il ne faut pas surestimer le pouvoir des conversations à la machine à café : la pandémie de COVID-19 nous l’a bien montré. » Il cite l’exemple des Américains, qui, aux yeux des Européens, se distinguent par leur amabilité théâtrale lors d’une première rencontre ou d’échanges brefs. « Nous trouvons que c’est superficiel, parce que dans notre culture, nous sous-estimons l’effet que peut avoir sur nous-mêmes le comportement que nous adoptons à l’égard des autres. Se montrer aimable, dire bonjour aux inconnus, etc. : ce sont des solutions simples quand on cherche à se sentir mieux dans sa peau. »
[3]Travailler avec des Wallons : ce que les Flamands doivent savoir
[1] https://daardaar.be/apprenez-le-neerlandais/awel-awel-le-nouveau-site-pour-apprendre-le-neerlandais-en-ligne/
[2] https://daardaar.be/formations/
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