«Les voyous sont presque toujours de jeunes immigrés»: De Wever a-t-il raison?
([Opinions] 2024-09-01 (Gazet van Antwerpen))
- Reference: 2024-09_Belgaimage-70462396-255x170
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« Ce sont presque toujours des jeunes issus de l’immigration, pour la plupart des non-Européens, qui grandissent ici avec peu de perspectives. En visionnant les images, nous n’avons pas été surpris par le profil des auteurs. Ce sont les mêmes qui importunent les femmes ou provoquent nos forces de l’ordre. »
Hier, Bart De Wever (N-VA) a manifestement troqué sa casquette de formateur fédéral contre celle de bourgmestre d’Anvers pour commenter la virée de trois jeunes, dimanche dernier à Anvers, à bord de l’ambulance qu’ils venaient de dérober. Si ce n’est pas un fait courant, il s’agit selon le nationaliste flamand, d’un comportement typique de ce qu’il qualifie de « voyous », de jeunes criminels qui s’en prennent de plus en plus souvent aux personnes qui incarnent l’autorité et aux services de secours.
Pour enrayer le phénomène, Bart De Wever prône la tolérance zéro à l’égard de ce type de violence. Il souhaite que ces faits ne soient plus jamais classés sans suite et est favorable à des procédures accélérées pour juger les auteurs. Une proposition déjà avancée par la N-VA pendant la campagne en vue du scrutin du 9 juin.
Dans un registre plus préventif, le bourgmestre suggère également une mesure tirée du programme électoral de son parti à Anvers : l’introduction de stages civiques pour tous les élèves de 5 ème ou 6 ème année de l’enseignement secondaire. Il s’agirait d’une expérience d’une semaine dans les soins ou dans un service communal, destinée à cultiver le civisme, à expliquer le fonctionnement de la ville et de la société, et à en encourager le respect. Certaines écoles, notamment catholiques, l’organisent déjà, mais Bart De Wever veut généraliser ces stages à Anvers. Il peut imposer la mesure dans l’enseignement communal, mais il entend aussi convenir de sa mise en place avec l’enseignement catholique et l’enseignement communautaire.
Ce n’est toutefois pas cette proposition qui a suscité la controverse mais bien la sortie du chef de file N-VA sur les personnes immigrées. Même au sein de son propre collège échevinal, les critiques ont fusé. Comme celle de l’échevin Vooruit Karim Bachar. « Il faut plus de fermeté et des poursuites plus rapides contre ce genre d’incidents, mais je ne peux pas accepter que l’on stigmatise toute une communauté. C’est une gifle pour tous ceux et celles qui contribuent au bien vivre dans notre ville », déplore le socialiste flamand, qui situe les déclarations de Bart De Wever dans le contexte électoral actuel. « Chacun peut faire des déclarations, mais je n’aime pas les généralisations. Un bourgmestre doit rassembler et non diviser », a-t-il expliqué.
Les partis d’opposition, Groen et le PVDA (l’aile flamande du PTB), ne se montrent pas plus tendres avec Bart De Wever. « Il n’y a qu’un mot pour qualifier le comportement des jeunes qui s’emparent d’une ambulance alors que les secours sont en train de prodiguer des soins vitaux : écœurant. Mais la réaction de Bart De Wever l’est tout autant », a déclaré la coprésidente de Groen Nadia Naji. Jos D’Haese du PVDA reproche, quant à lui, au leader de la N-VA de polariser le débat au lieu de chercher des solutions.
Le bourgmestre anversois a-t-il raison quand il affirme que ce type de violence ou d’incident est quasiment toujours le fait de personnes issues de l’immigration ? Pour Mattias De Backer, chercheur à l’École de criminologie de Louvain, c’est pratiquement impossible à vérifier. En effet, de nombreuses personnes d’origine immigrée sont belges et les statistiques criminelles ne font pas état de l’origine des individus.
Mais selon Mattias De Backer, ce ne sont pas les origines migratoires qui sont déterminantes, mais la situation socio-économique des intéressés. « Il est évident que les personnes issues de l’immigration sont plus susceptibles de grandir dans la précarité, et c’est précisément cette situation socio-économique qui sera décisive », ajoute-t-il. « Je l’ai constaté dans les études que j’ai menées auprès de jeunes issus de quartiers défavorisés. Automatiquement, les personnes qui se trouvent dans une telle situation, qui subissent des discriminations et qui se voient offrir moins d’opportunités, risquent davantage de s’opposer à l’autorité. Et pour ces jeunes, aussi regrettable que cela puisse paraître, les équipes de secours sont des représentants de l’autorité par qui ils ne se sentent pas représentés. C’est nous contre eux », explique le criminologue, qui a notamment mené des recherches à Molenbeek et à Anderlecht.
Consultez la vidéo sur le [1]site de nos confrères de la VRT.
Encadré
Tous nés en Belgique, mais des origines latino-américaines pour deux des comparses
Après la diffusion des images de la virée en ambulance volée qui n’a pas manqué de susciter l’indignation, deux des trois personnes impliquées ont pu être arrêtées. Le conducteur, un homme de 21 ans né à Anvers, est d’origine latino-américaine. Sa famille est, selon nos sources, originaire du Chili. Mais le parquet comme la police se refusent à confirmer cette information. Le parquet s’en tient à « né en Belgique ». Le conducteur a finalement été placé en détention par le juge d’instruction.
Le deuxième comparse serait, selon nos informations, lui aussi d’origine chilienne. Quant au troisième, il a des origines mixtes « maroco-flamandes », apprend-on. L’un des deux s’est rendu à la police juste après les faits, accompagné de son avocat. Il a été libéré sous conditions. L’autre est toujours recherché. Tous deux sont également de nationalité belge et nés dans notre pays.
Outre ces trois complices, deux autres personnes potentiellement impliquées dans les faits n’ont pas encore été appréhendées.
[1] https://www.vrt.be/vrtnws/fr/2024/09/09/trois-jeunes-volent-une-ambulance-en-pleine-intervention-a-anver/
Hier, Bart De Wever (N-VA) a manifestement troqué sa casquette de formateur fédéral contre celle de bourgmestre d’Anvers pour commenter la virée de trois jeunes, dimanche dernier à Anvers, à bord de l’ambulance qu’ils venaient de dérober. Si ce n’est pas un fait courant, il s’agit selon le nationaliste flamand, d’un comportement typique de ce qu’il qualifie de « voyous », de jeunes criminels qui s’en prennent de plus en plus souvent aux personnes qui incarnent l’autorité et aux services de secours.
Pour enrayer le phénomène, Bart De Wever prône la tolérance zéro à l’égard de ce type de violence. Il souhaite que ces faits ne soient plus jamais classés sans suite et est favorable à des procédures accélérées pour juger les auteurs. Une proposition déjà avancée par la N-VA pendant la campagne en vue du scrutin du 9 juin.
Dans un registre plus préventif, le bourgmestre suggère également une mesure tirée du programme électoral de son parti à Anvers : l’introduction de stages civiques pour tous les élèves de 5 ème ou 6 ème année de l’enseignement secondaire. Il s’agirait d’une expérience d’une semaine dans les soins ou dans un service communal, destinée à cultiver le civisme, à expliquer le fonctionnement de la ville et de la société, et à en encourager le respect. Certaines écoles, notamment catholiques, l’organisent déjà, mais Bart De Wever veut généraliser ces stages à Anvers. Il peut imposer la mesure dans l’enseignement communal, mais il entend aussi convenir de sa mise en place avec l’enseignement catholique et l’enseignement communautaire.
« Écœurant »
Ce n’est toutefois pas cette proposition qui a suscité la controverse mais bien la sortie du chef de file N-VA sur les personnes immigrées. Même au sein de son propre collège échevinal, les critiques ont fusé. Comme celle de l’échevin Vooruit Karim Bachar. « Il faut plus de fermeté et des poursuites plus rapides contre ce genre d’incidents, mais je ne peux pas accepter que l’on stigmatise toute une communauté. C’est une gifle pour tous ceux et celles qui contribuent au bien vivre dans notre ville », déplore le socialiste flamand, qui situe les déclarations de Bart De Wever dans le contexte électoral actuel. « Chacun peut faire des déclarations, mais je n’aime pas les généralisations. Un bourgmestre doit rassembler et non diviser », a-t-il expliqué.
Les partis d’opposition, Groen et le PVDA (l’aile flamande du PTB), ne se montrent pas plus tendres avec Bart De Wever. « Il n’y a qu’un mot pour qualifier le comportement des jeunes qui s’emparent d’une ambulance alors que les secours sont en train de prodiguer des soins vitaux : écœurant. Mais la réaction de Bart De Wever l’est tout autant », a déclaré la coprésidente de Groen Nadia Naji. Jos D’Haese du PVDA reproche, quant à lui, au leader de la N-VA de polariser le débat au lieu de chercher des solutions.
Opposition à l’autorité
Le bourgmestre anversois a-t-il raison quand il affirme que ce type de violence ou d’incident est quasiment toujours le fait de personnes issues de l’immigration ? Pour Mattias De Backer, chercheur à l’École de criminologie de Louvain, c’est pratiquement impossible à vérifier. En effet, de nombreuses personnes d’origine immigrée sont belges et les statistiques criminelles ne font pas état de l’origine des individus.
Mais selon Mattias De Backer, ce ne sont pas les origines migratoires qui sont déterminantes, mais la situation socio-économique des intéressés. « Il est évident que les personnes issues de l’immigration sont plus susceptibles de grandir dans la précarité, et c’est précisément cette situation socio-économique qui sera décisive », ajoute-t-il. « Je l’ai constaté dans les études que j’ai menées auprès de jeunes issus de quartiers défavorisés. Automatiquement, les personnes qui se trouvent dans une telle situation, qui subissent des discriminations et qui se voient offrir moins d’opportunités, risquent davantage de s’opposer à l’autorité. Et pour ces jeunes, aussi regrettable que cela puisse paraître, les équipes de secours sont des représentants de l’autorité par qui ils ne se sentent pas représentés. C’est nous contre eux », explique le criminologue, qui a notamment mené des recherches à Molenbeek et à Anderlecht.
Consultez la vidéo sur le [1]site de nos confrères de la VRT.
Encadré
Tous nés en Belgique, mais des origines latino-américaines pour deux des comparses
Après la diffusion des images de la virée en ambulance volée qui n’a pas manqué de susciter l’indignation, deux des trois personnes impliquées ont pu être arrêtées. Le conducteur, un homme de 21 ans né à Anvers, est d’origine latino-américaine. Sa famille est, selon nos sources, originaire du Chili. Mais le parquet comme la police se refusent à confirmer cette information. Le parquet s’en tient à « né en Belgique ». Le conducteur a finalement été placé en détention par le juge d’instruction.
Le deuxième comparse serait, selon nos informations, lui aussi d’origine chilienne. Quant au troisième, il a des origines mixtes « maroco-flamandes », apprend-on. L’un des deux s’est rendu à la police juste après les faits, accompagné de son avocat. Il a été libéré sous conditions. L’autre est toujours recherché. Tous deux sont également de nationalité belge et nés dans notre pays.
Outre ces trois complices, deux autres personnes potentiellement impliquées dans les faits n’ont pas encore été appréhendées.
[1] https://www.vrt.be/vrtnws/fr/2024/09/09/trois-jeunes-volent-une-ambulance-en-pleine-intervention-a-anver/