Dépenses électorales en ligne: un montant colossal d’argent public
([Culture et Médias] 2024-06-01 (Apache))
- Reference: 2024-06_1_uMPeymYL05E5wON9Q0BukQ-255x170
- News link: https://daardaar.be/rubriques/culture-et-medias/depenses-electorales-en-ligne-un-montant-colossal-dargent-public/
- Source link: https://apache.be/2024/06/13/online-verkiezingscampagne-kostte-74-miljoen-euro
Les partis belges ont dépensé ensemble plus de 7,4 millions d’euros en publicités en ligne au cours de la dernière campagne électorale. Environ 80 % de ce montant a été dépensé par les sept plus grands partis flamands. Avec plus de 1,5 million d’euros, le Vlaams Belang caracole en tête. La campagne électorale menée tambour battant sur les réseaux sociaux est désormais pleinement assumée par l’ensemble de la classe politique », analyse le politologue Gunther Vanden Eynde (KU Leuven).
Le Vlaams Belang, la N-VA, l’Open Vld, le CD&V, Vooruit, Groen et le PTB-PVDA ont ainsi dépensé 5 966 900 euros en publicités en ligne entre le 9 février et le 9 juin. Si l’on inclut également le MR, le PS, Les Engagés, Ecolo et les petits partis, le total s’élève à 7 405 800 euros. Ce montant comprend à la fois les dépenses du parti lui-même, des candidats individuels et des organisations connexes, telles que les jeunes des différents partis. La majeure partie de cettesomme provient des dotations publiques aux partis, soit de l’argent des contribuables.
« En quatre mois, les partis ont dépensé autant d’argent qu’au cours d’une année non électorale moyenne », explique Geert Van Damme d’AdLens, un collectif de citoyens qui a entrepris de calculer et d’analyser les publicités politiques en ligne.
Le 9 février, la période dite « d’attente » a commencé. Pendant cette période précédant les élections, les partis politiques et les candidats ne sont autorisés à dépenser qu’un budget limité : un million d’euros maximum. Le montant maximal des candidats individuels est calculé en fonction de leur place sur la liste. Certaines formes de propagande sont également interdites, comme les spots télévisés ou la vente de « goodies ».
« Les dépenses envisagées par les uns et les autres étaient plutôt prévisibles, poursuit Geert Van Damme. Un pic précède toujours le début de la période d’attente. Il a été suivi d’une lente montée en puissance, qui a finalement abouti à des dépenses très élevées au cours de la semaine juste avant les élections. »
Le Vlaams Belang a été le plus actif : les différents comptes affiliés au parti ont dépensé un total de 1 521 100 euros en publicités en ligne. Le parti d’extrême droite a dépensé plus de 1,1 million d’euros sur Meta, la société mère de Facebook et Instagram. Le reste de l’argent a été dépensé pour des publicités sur Google. Une somme importante a également été dépensée sur X, l’ancien Twitter.
« Ces dernières années, le Vlaams Belang est devenu l’un des plus grands partis politiques dans ce domaine, explique Geert Van Damme. En 2023, les nationalistes étaient même le plus grand « annonceur » d’Europe !
Aux deuxième et troisième places, on retrouve Vooruit et CD&V, avec respectivement 930 800 et 889 700 d’euros. « Ces chiffres démontrent l’importance croissante de la publicité en ligne dans le monde politique belge, conclut le politologue Gunther Vanden Eynde (KULeuven). « En 2019, les partis centristes sont restés relativement discrets, mais aujourd’hui, non seulement ils participent, mais ils font même partie des plus actifs. »
Grands perdants des élections, Open Vld et Groen ont aussi été ceux qui ont dépensé le moins de tous les partis flamands établis. Les libéraux ont dépensé 415 900 euros et Groen – bien qu’il ait rattrapé son retard en juin – 663 300 euros.
À noter, le classement de la N-VA, « seulement » cinquième de cette campagne, avec un peu moins de 700 000 euros. « Pourtant, ils ont clairement été le plus grand concurrent du Vlaams Belang sur ce plan ces dernières années, explique Geert Van Damme. En 2022, l’Alliance néo-flamande était même le plus grand parti d’Europe en termes de dépenses en ligne. En 2023, elle était deuxième en Europe, après le Vlaams Belang. »
Alors que le PTB-PVDA était en pole position au début de la campagne, le parti d’extrême gauche arrive finalement quatrième. Le parti a également adopté une approche moins diversifiée que ses concurrents. Alors que Vooruit et le CD&V ont consacré une part importante de leur budget aux publicités Google, le PTB-PVDA s’en est tenu pour l’essentiel à Facebook et Instagram.
Les publicités en ligne ne concernent pas uniquement les pages – nationales et locales – des partis sur les réseaux sociaux. Les candidats individuels ont également dépensé beaucoup pour leur promo personnelle : un peu plus de 700 000 euros, soit 10 % des dépenses totales.
Tom Van Grieken, président du Vlaams Belang, est de loin celui qui a le plus dépensé. Depuis le 9 février, il a consacré 398 000 d’euros aux publicités via ses pages personnelles Facebook et Insta. À l’exception des pages de son propre parti et du CD&V, aucune page en Belgique n’a dépensé plus d’argent en publicités politiques au cours de cette période. À lui seul, il a dépensé plus d’argent que ses adversaires en deuxième, troisième, quatrième et cinquième position réunis !
Les pontes du PTB-PVDA occupent les deuxième, troisième et quatrième rangs du top 10 flamand. Raoul Hedebouw (via sa page en néerlandais), Peter Mertens et Jos D’Haese ont dépensé respectivement 121.200, 101.000 et 92.600 euros. La présidente de Vooruit, Melissa Depraetere, occupe la cinquième place avec 64 100 euros.
Les sixième et septième places reviennent à Petra De Sutter (Groen) et Bart De Wever (N-VA). Trois membres de Vooruit ferment la marche dans le top 10 : Caroline Gennez, Frank Vandenbroucke et Conner Rousseau.
Les experts avec qui nous nous sommes entretenus indiquent que Vooruit a stratégiquement axé sa campagne autour de ses figures de proue, le parti ayant consacré énormément de ressources à ses candidats les plus populaires. Au fil de la campagne, le parti a misé de plus en plus sur le duo Depraetere-Rousseau : on retrouve ce duo dans neuf des dix vidéos qui ont coûté le plus aux socialistes en 2024.
Sur les plateformes du groupe Meta, les partis disposent d’une grande liberté pour délimiter avec précision le public cible de leurs publicités en fonction de la langue, du sexe, du lieu de résidence, de l’âge et des centres d’intérêts des utilisateurs. Tous les partis n’utilisent en revanche pas cette fonction de la même manière.
Une analyse des critères met en lumière que le Vlaams Belang a délibérément choisi de ne pas montrer la plupart de ses posts aux utilisateurs intéressés par le Maroc, la Turquie, l’Afghanistan, la Syrie, le Pakistan ou la Palestine. Les supporters des clubs de football turcs de Galatasaray et de Fenerbahçe ont également été exclus de la campagne.
Nozizwe Dube (Université de Maastricht), spécialiste du droit européen en matière de lutte contre les discriminations, avait déjà indiqué à Apache qu’il s’agissait-là de profilage ethnique indirect. « Si Meta ne permet pas en soi d’exclure des utilisateurs sur la base de leur origine ethnique ou de leurs antécédents migratoires, les partis peuvent recourir à des centres d’intérêts pour le faire de façon détournée. Il est évident que le parti ne veut pas que ses publicités soient vues par les musulmans. »
La fonctionnalité permettant de cibler les publicités par commune a également été abondamment utilisée. Ce sont les habitants d’Anvers, de Bruxelles et de Gand qui ont reçu en moyenne le plus de publicités. CD&V, Vlaams Belang et N-VA ont également adressé des publicités à des villes et communes plus petites telles que Dworp (Brabant flamand), Dendermonde (Flandre orientale) et Kinrooi (Limbourg).
Malgré l’importante couverture médiatique accordée aux « primo-votants », les partis n’ont pas accordé d’attention particulière à ce groupe en ligne. À quelques exceptions près, les posts ont toujours été présentés à des personnes de tous âges.
En Belgique, les partis reçoivent une dotation annuelle des pouvoirs publics en fonction de leurs résultats électoraux. Ces allocations aux partis sont payées avec l’argent des contribuables et sont nettement plus élevées que dans nos pays voisins.
Le politologue Bart Maddens (KULeuven) s’intéresse aux modes de financement des partis. Il a calculé le montant des dotations auxquelles les partis peuvent prétendre dans les années à venir en fonction de leurs résultats électoraux. À ce jeu, avec un peu moins de 12 millions d’euros par an, c’est la N-VA qui recevra le plus. Du côté flamand, le Vlaams Belang et le PTB-PVDA peuvent se prévaloir des deux plus fortes augmentations : ces deux partis recevront 1,5 million d’euros de plus au cours des cinq prochaines années (respectivement 10,4 et 8,2 millions d’euros par an).
« Nous n’assisterons sans doute pas de sitôt à une baisse des dépenses en publicité en ligne, anticipe Gunther Vanden Eynde. Le Vlaams Belang et le PTB-PVDA sont moins souvent invités sur les plateaux de télévision, ils compensent donc sur les réseaux sociaux. Et comme leurs budgets augmentent, ils auront encore plus d’argent à dépenser en ligne. »
Selon les spécialistes que nous avons interrogés, il convient de nuancer l’influence des publicités en ligne. « Soulignons les montants encore très élevés que les partis consacrent aux supports imprimés traditionnels, note ainsi le professeur Lefevere. La N-VA et l’Open Vld ont aussi misé sur la publicité dans les journaux et les tracts. En définitive, ils n’ont pas forcément dépensé moins, mais ils ont réparti leurs dépenses différemment. »
« Il n’est pas si simple de mesurer avec exactitude l’efficacité réelle des publicités en ligne, poursuit-il. Les études scientifiques menées sur cette question indiquent que les effets seraient en fait très limités, même si elles s’avèrent beaucoup plus pertinentes, par exemple, pour atteindre les jeunes, qui ne consultent pratiquement plus les médias traditionnels. » Un avis que partage Gunther Vanden Eynde. « La N-VA a une nouvelle fois démontré lors de cette campagne qu’une campagne hybride, qui utilise à la fois les médias numériques et traditionnels, constitue le meilleur gage de succès. Nous le constatons également à l’étranger. »
Geert Van Damme émet également quelques réserves sur le succès prétendument garanti des publicités en ligne. « Il n’y a pas de corrélation directe entre les dépenses et les résultats des élections. Les grands partis et les candidats connus dépensent plus d’argent, mais c’est aussi parce qu’ils disposent de plus de moyens. Les publicités peuvent s’acheter, pas les voix. »
Au terme des élections, les partis sont tenus de publier leurs dépenses en « propagande ». Ce n’est que lorsque ces chiffres seront disponibles que nous pourrons situer les publicités en ligne dans le cadre plus large de toutes dépenses consenties par les uns et les autres. « Il est néanmoins un fait établi que les partis dépensent de plus en plus d’argent en publicités en ligne », conclut Gunther Vanden Eynde.
Il n’est pas non plus nouveau que les partis flamands dépensent plus que leurs homologues bruxellois et wallons. « Nous l’observons déjà depuis les élections de 2019, confirme Geert Van Damme. Cette course à la publicité en ligne en Flandre est née en réaction aux pratiques du Vlaams Belang : voyant combien l’extrême droite dépensait en propagande en ligne, les autres partis se sont sentis obligés de suivre le mouvement. »
Les partis francophones ne sont pas en reste « Ce n’est pas parce qu’ils dépensent significativement moins que leurs homologues flamands que les partis francophones ne dépensent pas. Les Engagés, en particulier, ont dépensé énormément lors de cette campagne électorale. Le parti de Maxime Prévot a même dépensé plus que l’Open Vld. Il est le seul parti francophone à avoir dépensé plus d’argent qu’un parti flamand !
Les candidats individuels s’aventurent également sur ce terrain. Deux ténors wallons, Paul Magnette (PS) et Georges-Louis Bouchez (MR), ont terminé dans le top 10 des candidats belges ayant le plus dépensé en ligne : Magnette arrive en huitième position, Bouchez en dixième.
Le Vlaams Belang, la N-VA, l’Open Vld, le CD&V, Vooruit, Groen et le PTB-PVDA ont ainsi dépensé 5 966 900 euros en publicités en ligne entre le 9 février et le 9 juin. Si l’on inclut également le MR, le PS, Les Engagés, Ecolo et les petits partis, le total s’élève à 7 405 800 euros. Ce montant comprend à la fois les dépenses du parti lui-même, des candidats individuels et des organisations connexes, telles que les jeunes des différents partis. La majeure partie de cettesomme provient des dotations publiques aux partis, soit de l’argent des contribuables.
« En quatre mois, les partis ont dépensé autant d’argent qu’au cours d’une année non électorale moyenne », explique Geert Van Damme d’AdLens, un collectif de citoyens qui a entrepris de calculer et d’analyser les publicités politiques en ligne.
Le 9 février, la période dite « d’attente » a commencé. Pendant cette période précédant les élections, les partis politiques et les candidats ne sont autorisés à dépenser qu’un budget limité : un million d’euros maximum. Le montant maximal des candidats individuels est calculé en fonction de leur place sur la liste. Certaines formes de propagande sont également interdites, comme les spots télévisés ou la vente de « goodies ».
« Les dépenses envisagées par les uns et les autres étaient plutôt prévisibles, poursuit Geert Van Damme. Un pic précède toujours le début de la période d’attente. Il a été suivi d’une lente montée en puissance, qui a finalement abouti à des dépenses très élevées au cours de la semaine juste avant les élections. »
Le Vlaams Belang a été le plus actif : les différents comptes affiliés au parti ont dépensé un total de 1 521 100 euros en publicités en ligne. Le parti d’extrême droite a dépensé plus de 1,1 million d’euros sur Meta, la société mère de Facebook et Instagram. Le reste de l’argent a été dépensé pour des publicités sur Google. Une somme importante a également été dépensée sur X, l’ancien Twitter.
« Ces dernières années, le Vlaams Belang est devenu l’un des plus grands partis politiques dans ce domaine, explique Geert Van Damme. En 2023, les nationalistes étaient même le plus grand « annonceur » d’Europe !
Aux deuxième et troisième places, on retrouve Vooruit et CD&V, avec respectivement 930 800 et 889 700 d’euros. « Ces chiffres démontrent l’importance croissante de la publicité en ligne dans le monde politique belge, conclut le politologue Gunther Vanden Eynde (KULeuven). « En 2019, les partis centristes sont restés relativement discrets, mais aujourd’hui, non seulement ils participent, mais ils font même partie des plus actifs. »
Grands perdants des élections, Open Vld et Groen ont aussi été ceux qui ont dépensé le moins de tous les partis flamands établis. Les libéraux ont dépensé 415 900 euros et Groen – bien qu’il ait rattrapé son retard en juin – 663 300 euros.
À noter, le classement de la N-VA, « seulement » cinquième de cette campagne, avec un peu moins de 700 000 euros. « Pourtant, ils ont clairement été le plus grand concurrent du Vlaams Belang sur ce plan ces dernières années, explique Geert Van Damme. En 2022, l’Alliance néo-flamande était même le plus grand parti d’Europe en termes de dépenses en ligne. En 2023, elle était deuxième en Europe, après le Vlaams Belang. »
Alors que le PTB-PVDA était en pole position au début de la campagne, le parti d’extrême gauche arrive finalement quatrième. Le parti a également adopté une approche moins diversifiée que ses concurrents. Alors que Vooruit et le CD&V ont consacré une part importante de leur budget aux publicités Google, le PTB-PVDA s’en est tenu pour l’essentiel à Facebook et Instagram.
Sur le plan individuel
Les publicités en ligne ne concernent pas uniquement les pages – nationales et locales – des partis sur les réseaux sociaux. Les candidats individuels ont également dépensé beaucoup pour leur promo personnelle : un peu plus de 700 000 euros, soit 10 % des dépenses totales.
Tom Van Grieken, président du Vlaams Belang, est de loin celui qui a le plus dépensé. Depuis le 9 février, il a consacré 398 000 d’euros aux publicités via ses pages personnelles Facebook et Insta. À l’exception des pages de son propre parti et du CD&V, aucune page en Belgique n’a dépensé plus d’argent en publicités politiques au cours de cette période. À lui seul, il a dépensé plus d’argent que ses adversaires en deuxième, troisième, quatrième et cinquième position réunis !
Les pontes du PTB-PVDA occupent les deuxième, troisième et quatrième rangs du top 10 flamand. Raoul Hedebouw (via sa page en néerlandais), Peter Mertens et Jos D’Haese ont dépensé respectivement 121.200, 101.000 et 92.600 euros. La présidente de Vooruit, Melissa Depraetere, occupe la cinquième place avec 64 100 euros.
Les sixième et septième places reviennent à Petra De Sutter (Groen) et Bart De Wever (N-VA). Trois membres de Vooruit ferment la marche dans le top 10 : Caroline Gennez, Frank Vandenbroucke et Conner Rousseau.
Les experts avec qui nous nous sommes entretenus indiquent que Vooruit a stratégiquement axé sa campagne autour de ses figures de proue, le parti ayant consacré énormément de ressources à ses candidats les plus populaires. Au fil de la campagne, le parti a misé de plus en plus sur le duo Depraetere-Rousseau : on retrouve ce duo dans neuf des dix vidéos qui ont coûté le plus aux socialistes en 2024.
Profilage ethnique indirect
Sur les plateformes du groupe Meta, les partis disposent d’une grande liberté pour délimiter avec précision le public cible de leurs publicités en fonction de la langue, du sexe, du lieu de résidence, de l’âge et des centres d’intérêts des utilisateurs. Tous les partis n’utilisent en revanche pas cette fonction de la même manière.
Une analyse des critères met en lumière que le Vlaams Belang a délibérément choisi de ne pas montrer la plupart de ses posts aux utilisateurs intéressés par le Maroc, la Turquie, l’Afghanistan, la Syrie, le Pakistan ou la Palestine. Les supporters des clubs de football turcs de Galatasaray et de Fenerbahçe ont également été exclus de la campagne.
Nozizwe Dube (Université de Maastricht), spécialiste du droit européen en matière de lutte contre les discriminations, avait déjà indiqué à Apache qu’il s’agissait-là de profilage ethnique indirect. « Si Meta ne permet pas en soi d’exclure des utilisateurs sur la base de leur origine ethnique ou de leurs antécédents migratoires, les partis peuvent recourir à des centres d’intérêts pour le faire de façon détournée. Il est évident que le parti ne veut pas que ses publicités soient vues par les musulmans. »
La fonctionnalité permettant de cibler les publicités par commune a également été abondamment utilisée. Ce sont les habitants d’Anvers, de Bruxelles et de Gand qui ont reçu en moyenne le plus de publicités. CD&V, Vlaams Belang et N-VA ont également adressé des publicités à des villes et communes plus petites telles que Dworp (Brabant flamand), Dendermonde (Flandre orientale) et Kinrooi (Limbourg).
Malgré l’importante couverture médiatique accordée aux « primo-votants », les partis n’ont pas accordé d’attention particulière à ce groupe en ligne. À quelques exceptions près, les posts ont toujours été présentés à des personnes de tous âges.
L’argent des contribuables
En Belgique, les partis reçoivent une dotation annuelle des pouvoirs publics en fonction de leurs résultats électoraux. Ces allocations aux partis sont payées avec l’argent des contribuables et sont nettement plus élevées que dans nos pays voisins.
Le politologue Bart Maddens (KULeuven) s’intéresse aux modes de financement des partis. Il a calculé le montant des dotations auxquelles les partis peuvent prétendre dans les années à venir en fonction de leurs résultats électoraux. À ce jeu, avec un peu moins de 12 millions d’euros par an, c’est la N-VA qui recevra le plus. Du côté flamand, le Vlaams Belang et le PTB-PVDA peuvent se prévaloir des deux plus fortes augmentations : ces deux partis recevront 1,5 million d’euros de plus au cours des cinq prochaines années (respectivement 10,4 et 8,2 millions d’euros par an).
« Nous n’assisterons sans doute pas de sitôt à une baisse des dépenses en publicité en ligne, anticipe Gunther Vanden Eynde. Le Vlaams Belang et le PTB-PVDA sont moins souvent invités sur les plateaux de télévision, ils compensent donc sur les réseaux sociaux. Et comme leurs budgets augmentent, ils auront encore plus d’argent à dépenser en ligne. »
Combiner en ligne ou hors ligne
Selon les spécialistes que nous avons interrogés, il convient de nuancer l’influence des publicités en ligne. « Soulignons les montants encore très élevés que les partis consacrent aux supports imprimés traditionnels, note ainsi le professeur Lefevere. La N-VA et l’Open Vld ont aussi misé sur la publicité dans les journaux et les tracts. En définitive, ils n’ont pas forcément dépensé moins, mais ils ont réparti leurs dépenses différemment. »
« Il n’est pas si simple de mesurer avec exactitude l’efficacité réelle des publicités en ligne, poursuit-il. Les études scientifiques menées sur cette question indiquent que les effets seraient en fait très limités, même si elles s’avèrent beaucoup plus pertinentes, par exemple, pour atteindre les jeunes, qui ne consultent pratiquement plus les médias traditionnels. » Un avis que partage Gunther Vanden Eynde. « La N-VA a une nouvelle fois démontré lors de cette campagne qu’une campagne hybride, qui utilise à la fois les médias numériques et traditionnels, constitue le meilleur gage de succès. Nous le constatons également à l’étranger. »
Geert Van Damme émet également quelques réserves sur le succès prétendument garanti des publicités en ligne. « Il n’y a pas de corrélation directe entre les dépenses et les résultats des élections. Les grands partis et les candidats connus dépensent plus d’argent, mais c’est aussi parce qu’ils disposent de plus de moyens. Les publicités peuvent s’acheter, pas les voix. »
Au terme des élections, les partis sont tenus de publier leurs dépenses en « propagande ». Ce n’est que lorsque ces chiffres seront disponibles que nous pourrons situer les publicités en ligne dans le cadre plus large de toutes dépenses consenties par les uns et les autres. « Il est néanmoins un fait établi que les partis dépensent de plus en plus d’argent en publicités en ligne », conclut Gunther Vanden Eynde.
La Wallonie pas en reste
Il n’est pas non plus nouveau que les partis flamands dépensent plus que leurs homologues bruxellois et wallons. « Nous l’observons déjà depuis les élections de 2019, confirme Geert Van Damme. Cette course à la publicité en ligne en Flandre est née en réaction aux pratiques du Vlaams Belang : voyant combien l’extrême droite dépensait en propagande en ligne, les autres partis se sont sentis obligés de suivre le mouvement. »
Les partis francophones ne sont pas en reste « Ce n’est pas parce qu’ils dépensent significativement moins que leurs homologues flamands que les partis francophones ne dépensent pas. Les Engagés, en particulier, ont dépensé énormément lors de cette campagne électorale. Le parti de Maxime Prévot a même dépensé plus que l’Open Vld. Il est le seul parti francophone à avoir dépensé plus d’argent qu’un parti flamand !
Les candidats individuels s’aventurent également sur ce terrain. Deux ténors wallons, Paul Magnette (PS) et Georges-Louis Bouchez (MR), ont terminé dans le top 10 des candidats belges ayant le plus dépensé en ligne : Magnette arrive en huitième position, Bouchez en dixième.