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  ARM Give a man a fire and he's warm for a day, but set fire to him and he's warm for the rest of his life (Terry Pratchett, Jingo)

La Flandre peut (aussi) remercier la Wallonie

([Opinions] 2024-05-01 (Het Laatste Nieuws))


Réaction d’un ministre wallon à ma chronique précédente (oui, même le gouvernement wallon lit Het Laatste Nieuws ) : « Vos chiffres sont déprimants ! Félicitations ! Vous avez confirmé tous les clichés moribonds qui circulent sur le sud du pays. La N-VA et le Vlaams Belang n’en demandaient pas tant, eux qui font miroiter à la Flandre que l’avenir sera plus radieux sans nous. » J’attends donc les félicitations (toujours bienvenues) des nationalistes flamands ! Et si les ministres wallons lisaient mes billets jusqu’au bout, le monde s’en porterait encore mieux. Car dans ma conclusion, j’évoquais les nombreuses lueurs d’espoir que je comptais aborder aujourd’hui. Que la lumière soit !

La Wallonie possède trois quarts des forêts belges. Venez vous y promener ! D’autant qu’ici, ce sont les congés de printemps, tout est donc ouvert. Avec la Flandre, nous sommes vraiment complémentaires. Nous avons de la main-d’œuvre disponible, de l’espace, un air plus sain (sauf à Liège et à Charleroi, où il subsiste plus d’entreprises qu’on ne l’imagine). Les Wallons n’ont pas à se qualifier, comme le font constamment les Flamands, de « bourguignons », synonyme en Flandre de «bons vivants», quoiqu’il y ait de quoi douter du caractère bon vivant du sanguinaire Charles le Téméraire. Pour nous, être wallon, c’est par définition profiter des agréments de la vie. Mais je concède qu’en Belgique, quand on dit A, on doit immédiatement dire B. Ce n’est pas pour rien que le nom de notre pays commence par la lettre B. Les Wallons gentils par nature, c’est un mythe. Nous sommes moins ouverts que les Flamands : en effet, selon la European Values Study, qui publie des données sur les valeurs des Européens, 75 % des francophones belges se méfient de leurs semblables, pour 62 % dans le nord du pays. Cette méfiance s’explique par la faiblesse économique de la région. Cependant, nous préférons nous montrer sous notre plus beau jour pour nous attirer un minimum de sympathie de la part des Flamands.

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Bon, je vais tâcher de rester positif, au risque de recevoir un autre e-mail énervé de mes instances dirigeantes. Nous, Wallons, aimons partager. Nos joyaux de la couronne, nous ne les gardons pas pour nous. Par exemple, le siège social de Spa Monopole se trouve à Bruxelles. Pour la direction, la capitale s’avère plus pratique que Spa dans un contexte de développement international. C’est donc Bruxelles qui empoche les (beaux) bénéfices de l’eau de Spa plutôt que la Wallonie. Nous sommes plus performants que ce que les chiffres semblent dire. Les sociétés flamandes, en revanche, ont tendance à rester en Flandre : le siège social de Lotus Bakeries, par exemple, se situe à Lembeke. La Wallonie est pourtant plus avantageuse : les salaires y sont 15 % moins élevés qu’en Flandre. Entrepreneurs flamands, soyez les bienvenus !

Oui, la Flandre peut remercier la Wallonie. Chaque année, nous achetons des produits flamands pour 7 milliards de plus que les Flamands achètent de produits wallons. Voilà de quoi presque compenser les transferts Nord-Sud en sécurité sociale – quelque 8 milliards d’euros – mais nous n’en entendons jamais parler. Tout comme nous ne parlons jamais de la chance qu’a eue la Flandre après 1945. Le port d’Anvers était le seul entre Hambourg et le Havre à tenir à peu près debout. L’aide américaine, dans le cadre du Plan Marshall, a donc transité par la Flandre. C’est ce qui a permis le développement des secteurs pétrolier et chimique à Anvers.

Mais peu importe : chance ou non, il est temps que la Wallonie bouge. En ce sens, nous pouvons dire que la menace confédérale du Nord est salutaire. Elle nous fait comprendre que le redressement devient urgent. Encore cette complémentarité entre les deux Régions. Merci, la Flandre !



[1] https://daardaar.be/rubriques/societe/chomage-monolinguisme-routes-trouees-alain-gerlache-sest-penche-sur-les-cliches-sur-la-wallonie/



Kin, n.:
An affliction of the blood.