Dries Van Langenhove règne en maître sur la 22e Veillée de l’Yser
([Politique, Société] 2023-08-01 (De Morgen))
- Reference: 2023-08_Belgaimage-72706338-255x170
- News link: https://daardaar.be/rubriques/societe/dries-van-langenhove-regne-en-maitre-sur-la-22e-veillee-de-lyser/
- Source link: https://www.demorgen.be/nieuws/herbruikbare-bekers-selfies-met-dries-van-langenhove-en-boeken-over-august-borms-zo-verliep-de-22ste-ijzerwake~b95d1b5c/
La 22 e édition de la Veillée de l’Yser, la manifestation annuelle du nationalisme flamand organisée dans le Westhoek, a bel et bien eu lieu dimanche à Ypres. Cette année, [1]l’agitation qui a précédé la tenue de l’événement s’est révélée être un cadeau pour Dries Van Langenhove, qui devient plus que jamais la tête d’affiche de la droite conservatrice flamande.
« Je n’ai pas entendu le discours de Dries Van Langenhove », nous a fait savoir la bourgmestre d’Ypres, Emmily Talpe (Open Vld), lors de notre appel dimanche. « La police m’a informée qu’il n’y avait eu aucune infraction à la législation antidiscrimination. Pour moi, c’est le principal. Les critiques qui me visent ne me font ni chaud ni froid. »
Le soleil était de la partie, ce dimanche, dans la prairie de Steenstrate où les groupements nationalistes flamands organisent leur réunion annuelle. Un coup de pouce de la météo bon pour le moral : « c’est une agréable veillée », expliquait la dame de l’entrée — avant de se reprendre : « je veux dire une veillée digne, bien entendu. »
Après la célébration de la messe et l’hommage floral, c’est Dries Van Langenhove qui prend la parole. Il s’adresse alors directement à la bourgmestre d’Ypres. « Vous n’osez pas vous présenter ici, mais je sais que vous nous suivez en direct. En temps normal, je ne gâcherais pas ma salive pour une bonne à rien libérale de votre espèce, mais comme vous avez cherché à me menacer et à m’intimider, je ne peux évidemment pas m’empêcher d’en rire. »
[2]Dries Van Langenhove démissionne de son mandat de député : une aubaine pour le Vlaams Belang ?
Vu tout le tapage occasionné par la tenue de l’événement, il semble peu probable qu’Emmily Talpe ait raté le discours de Dries Van Langenhove. L’administration communale s’était en effet montrée particulièrement contrariée par l’annonce de son intervention. La veillée a finalement été autorisée après la signature, par les organisateurs, d’ [3]une « charte de la paix » établissant que le racisme, les discriminations et les discours haineux n’ont pas leur place à Ypres.
Ruée pour les selfies
Ce tumulte s’est avéré être une bénédiction pour Dries Van Langenhove, ancien député du Vlaams Belang et fondateur du groupe d’extrême droite Schild & Vrienden. L’intérêt porté à cet invité a été bien plus important que celui accordé au discours du président de la veillée, Wim De Wit : après son intervention, Dries Van Langenhove a posé, tout sourire, face à la longue queue de participants attendant un selfie avec lui.
« Grâce à l’époque historique que nous vivons et à [4]l’utilisation d’internet et des réseaux sociaux , mes paroles trouveront un écho auprès de très nombreux Flamands, plus encore qu’à l’époque du Pèlerinage de l’Yser. Nous n’avons pas d’autre choix que de tirer le meilleur parti des possibilités qui s’offrent à nous en cette période », a déclaré Dries Van Langenhove.
En 2018, le magazine de reportage Pano était parvenu à infiltrer les groupes de discussion secrets du mouvement de jeunesse d’extrême droite Schild & Vrienden, dans lesquels circulaient des messages empreints de haine à l’encontre de toute personne supposée étrangère ou différente, certains membres allant jusqu’à poser avec des armes. Le procès de Schild & Vrienden doit s’ouvrir le 12 septembre à Gand. Dries Van Langenhove et six co-accusés devront y répondre d’accusations de négationnisme et d’incitation à la discrimination, à la haine ou à la violence sur leurs plateformes de communication.
[5]Procès Schild en Vrienden : la frontière ténue entre humour et racisme
Lors de la veillée, la bourgmestre d’Ypres n’a pas été la seule à en prendre pour son grade : Dries Van Langenhove s’est également attaqué aux médias grand public, aux « politiciens du système » et à la politique d’asile. Sur le fond, son message ne différait pas tellement des communications classiques du Vlaams Belang. Ce qui ne veut pas dire que Van Langenhove soit devenu plus modéré.
Dans un entretien accordé à MO* l’année dernière, Christopher Busch, directeur de l’Institut Hannah Arendt, mettait en garde contre la tentation de minimiser la nature complexe de l’extrémisme. « Les réseaux extrémistes peuvent être comparés à un rhizome, un enchevêtrement de racines qui poussent sous terre et s’entremêlent avec d’autres racines. Des pousses apparaissent parfois en surface, mais même si on les coupe, un organisme vivant continue bel et bien à se développer sous terre. »
Publications sulfureuses
Selon les organisateurs, 2 500 à 3 000 personnes ont participé à la 22 e édition de la Veillée de l’Yser. Si les fauteurs de troubles néonazis sont restés discrets, l’idéologie d’extrême droite s’est à nouveau emparée du village, où l’asbl Werkgroep Kesterheide tenait un stand d’information. Depuis 2014, elle assure l’entretien du terrain où se trouve l’ancien mausolée de Staf De Clercq, l’un des collaborateurs flamands les plus célèbres.
Dans les échoppes poussiéreuses, on pouvait trouver, outre les publications de Felix Timmermans et d’Ernest Claes, des portraits d’August Borms, condamné à mort pour collaboration, ainsi qu’une collection de la revue Der Adler , un magazine bihebdomadaire de propagande nazie publié avant et pendant la Seconde Guerre mondiale par Scherl Verlag avec le soutien de la Luftwaffe. « Il ne faut pas chercher trop loin », explique alors un homme en faisant glisser la revue entre ses mains. « Les gens s’intéressent beaucoup à l’histoire, tout simplement. »
La Veillée de l’Yser a été créée en 2003. À l’époque, le Vlaams Blok, le prédécesseur du Vlaams Belang, a fait dissidence du pèlerinage de l’Yser, considéré comme insuffisamment radical. Outre le Vlaams Belang, la Veillée de l’Yser a également rassemblé des groupes tels que Were Di (qui œuvre pour la réunification thioise), l’organisation d’extrême droite Voorpost, l’Alliance de la Jeunesse nationale flamande (VNJ) et l’Association des étudiants flamands nationalistes (NSV).
Entre les lancers de drapeaux, les danses folkloriques et les coups de clairon, on a pu constater une petite innovation par rapport à l’année dernière : au bar, les boissons étaient servies dans des gobelets réutilisables — dans ce domaine aussi, la Veillée de l’Yser est au diapason.
[1] https://www.vrt.be/vrtnws/fr/2023/08/03/les-critiques-se-multiplient-a-ypres-contre-la-venue-de-dries-va/
[2] https://daardaar.be/rubriques/politique/dries-van-langenhove-demissionne-de-son-mandat-de-depute-une-aubaine-pour-le-vlaams-belang/
[3] https://www.vrt.be/vrtnws/fr/2023/08/17/la-veillee-de-l-yser-autorisee-apres-signature-de-la-charte-de-l/
[4] https://daardaar.be/rubriques/politique/dries-van-langenhove-a-deja-son-canal-sur-odysee-le-youtube-de-lextreme-droite/
[5] https://daardaar.be/rubriques/societe/proces-de-dries-van-langenhove-la-frontiere-tenue-entre-humour-et-racisme/
« Je n’ai pas entendu le discours de Dries Van Langenhove », nous a fait savoir la bourgmestre d’Ypres, Emmily Talpe (Open Vld), lors de notre appel dimanche. « La police m’a informée qu’il n’y avait eu aucune infraction à la législation antidiscrimination. Pour moi, c’est le principal. Les critiques qui me visent ne me font ni chaud ni froid. »
Le soleil était de la partie, ce dimanche, dans la prairie de Steenstrate où les groupements nationalistes flamands organisent leur réunion annuelle. Un coup de pouce de la météo bon pour le moral : « c’est une agréable veillée », expliquait la dame de l’entrée — avant de se reprendre : « je veux dire une veillée digne, bien entendu. »
Après la célébration de la messe et l’hommage floral, c’est Dries Van Langenhove qui prend la parole. Il s’adresse alors directement à la bourgmestre d’Ypres. « Vous n’osez pas vous présenter ici, mais je sais que vous nous suivez en direct. En temps normal, je ne gâcherais pas ma salive pour une bonne à rien libérale de votre espèce, mais comme vous avez cherché à me menacer et à m’intimider, je ne peux évidemment pas m’empêcher d’en rire. »
[2]Dries Van Langenhove démissionne de son mandat de député : une aubaine pour le Vlaams Belang ?
Vu tout le tapage occasionné par la tenue de l’événement, il semble peu probable qu’Emmily Talpe ait raté le discours de Dries Van Langenhove. L’administration communale s’était en effet montrée particulièrement contrariée par l’annonce de son intervention. La veillée a finalement été autorisée après la signature, par les organisateurs, d’ [3]une « charte de la paix » établissant que le racisme, les discriminations et les discours haineux n’ont pas leur place à Ypres.
Ruée pour les selfies
Ce tumulte s’est avéré être une bénédiction pour Dries Van Langenhove, ancien député du Vlaams Belang et fondateur du groupe d’extrême droite Schild & Vrienden. L’intérêt porté à cet invité a été bien plus important que celui accordé au discours du président de la veillée, Wim De Wit : après son intervention, Dries Van Langenhove a posé, tout sourire, face à la longue queue de participants attendant un selfie avec lui.
« Grâce à l’époque historique que nous vivons et à [4]l’utilisation d’internet et des réseaux sociaux , mes paroles trouveront un écho auprès de très nombreux Flamands, plus encore qu’à l’époque du Pèlerinage de l’Yser. Nous n’avons pas d’autre choix que de tirer le meilleur parti des possibilités qui s’offrent à nous en cette période », a déclaré Dries Van Langenhove.
En 2018, le magazine de reportage Pano était parvenu à infiltrer les groupes de discussion secrets du mouvement de jeunesse d’extrême droite Schild & Vrienden, dans lesquels circulaient des messages empreints de haine à l’encontre de toute personne supposée étrangère ou différente, certains membres allant jusqu’à poser avec des armes. Le procès de Schild & Vrienden doit s’ouvrir le 12 septembre à Gand. Dries Van Langenhove et six co-accusés devront y répondre d’accusations de négationnisme et d’incitation à la discrimination, à la haine ou à la violence sur leurs plateformes de communication.
[5]Procès Schild en Vrienden : la frontière ténue entre humour et racisme
Lors de la veillée, la bourgmestre d’Ypres n’a pas été la seule à en prendre pour son grade : Dries Van Langenhove s’est également attaqué aux médias grand public, aux « politiciens du système » et à la politique d’asile. Sur le fond, son message ne différait pas tellement des communications classiques du Vlaams Belang. Ce qui ne veut pas dire que Van Langenhove soit devenu plus modéré.
Dans un entretien accordé à MO* l’année dernière, Christopher Busch, directeur de l’Institut Hannah Arendt, mettait en garde contre la tentation de minimiser la nature complexe de l’extrémisme. « Les réseaux extrémistes peuvent être comparés à un rhizome, un enchevêtrement de racines qui poussent sous terre et s’entremêlent avec d’autres racines. Des pousses apparaissent parfois en surface, mais même si on les coupe, un organisme vivant continue bel et bien à se développer sous terre. »
Publications sulfureuses
Selon les organisateurs, 2 500 à 3 000 personnes ont participé à la 22 e édition de la Veillée de l’Yser. Si les fauteurs de troubles néonazis sont restés discrets, l’idéologie d’extrême droite s’est à nouveau emparée du village, où l’asbl Werkgroep Kesterheide tenait un stand d’information. Depuis 2014, elle assure l’entretien du terrain où se trouve l’ancien mausolée de Staf De Clercq, l’un des collaborateurs flamands les plus célèbres.
Dans les échoppes poussiéreuses, on pouvait trouver, outre les publications de Felix Timmermans et d’Ernest Claes, des portraits d’August Borms, condamné à mort pour collaboration, ainsi qu’une collection de la revue Der Adler , un magazine bihebdomadaire de propagande nazie publié avant et pendant la Seconde Guerre mondiale par Scherl Verlag avec le soutien de la Luftwaffe. « Il ne faut pas chercher trop loin », explique alors un homme en faisant glisser la revue entre ses mains. « Les gens s’intéressent beaucoup à l’histoire, tout simplement. »
La Veillée de l’Yser a été créée en 2003. À l’époque, le Vlaams Blok, le prédécesseur du Vlaams Belang, a fait dissidence du pèlerinage de l’Yser, considéré comme insuffisamment radical. Outre le Vlaams Belang, la Veillée de l’Yser a également rassemblé des groupes tels que Were Di (qui œuvre pour la réunification thioise), l’organisation d’extrême droite Voorpost, l’Alliance de la Jeunesse nationale flamande (VNJ) et l’Association des étudiants flamands nationalistes (NSV).
Entre les lancers de drapeaux, les danses folkloriques et les coups de clairon, on a pu constater une petite innovation par rapport à l’année dernière : au bar, les boissons étaient servies dans des gobelets réutilisables — dans ce domaine aussi, la Veillée de l’Yser est au diapason.
[1] https://www.vrt.be/vrtnws/fr/2023/08/03/les-critiques-se-multiplient-a-ypres-contre-la-venue-de-dries-va/
[2] https://daardaar.be/rubriques/politique/dries-van-langenhove-demissionne-de-son-mandat-de-depute-une-aubaine-pour-le-vlaams-belang/
[3] https://www.vrt.be/vrtnws/fr/2023/08/17/la-veillee-de-l-yser-autorisee-apres-signature-de-la-charte-de-l/
[4] https://daardaar.be/rubriques/politique/dries-van-langenhove-a-deja-son-canal-sur-odysee-le-youtube-de-lextreme-droite/
[5] https://daardaar.be/rubriques/societe/proces-de-dries-van-langenhove-la-frontiere-tenue-entre-humour-et-racisme/