kuisine: du vin nature, natuurlijk!
([kuisine] 2023-05-01 (DaarDaar))
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- News link: https://daardaar.be/kuisine/kuisine-du-vin-nature-natuurlijk/
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Basé à Courtrai, Servaas Blockeel est le premier et seul vigneron nature en Belgique. Quand il s’est lancé dans cette voie, la seule chose dont il était sûr, c’était qu’il allait faire pousser du raisin pour en faire du vin. Le tout dans une démarche écologique.
Une culture, c’est forcément une manipulation de la nature. Mais j’essaie de la manipuler le moins possible. Je laisse la nature faire les choses et tout va bien dans la plupart des cas. Les plantes ne sont pas en compétition. Beaucoup de vignerons pensent qu’il faut détruire les plantes qui sont sous la vigne, sans quoi elle ne pourrait pas pousser. Mais la vigne est une plante costaud ! Les agriculteurs et maraîchers usent et abusent des pesticides (insecticides, fongicides, herbicides, ndlr). Or, une fois que la vigne prend, il n’y a plus de souci à se faire. Mes vins de 2022 sont actuellement en cuve. Ceux de 2021 sont déjà épuisés, je n’en avais pas beaucoup, les étourneaux ont mangé 75% de ma production. Ça fait partie des aléas.
Les labours en profondeur constituent un autre problème. Les machines, toujours plus puissantes, détruisent la structure naturelle de la terre qui héberge de nombreux êtres vivants. Petit à petit, toute cette vie se dégrade. Même la terre n’est plus capable de capter l’eau. Si on arrêtait de labourer les sols, on restituerait cette biodiversité.
Je ne travaille pas avec des cépages classiques, j’utilise un croisement entre différentes variétés. La plupart des vignerons s’appuient sur des vignes des 17 e et 18 e siècles. C’est débile car elles sont pleines de pesticides. En France, la surface viticole couvre à peine 3% de toute la surface agricole, mais elle représente 40 à 50% des traitements fongicides ! La solution ? Replanter de nouvelles vignes, mais ça demande une certaine audace. Mais ça paie. Économiquement parlant, ça ne sert à rien de fabriquer un produit qu’on trouve déjà partout.
Je vinifie et j’élève mes cuvées dans des contenants en plastique en forme d’œufs. Quand je parle de plastique à mes collègues du monde du vin nature, ça les rend dingues, surtout les biodynamistes. Le bois est un produit naturel, mais les amateurs de vins nature n’apprécient pas forcément les arômes boisés. Puis les forêts sont en train de disparaître, on ne retrouve plus de chênes de 400 ans. Les barriques y sont pour quelque chose, ça me gêne. Sans parler des bretts (les brettanomyces dites « bretts » sont des levures de contamination, ndlr) ou d’autres bactéries qui s’installent dans les vieilles barriques.
La fibre de verre aurait pu être une option, mais elle est trop étanche et ne permet pas à l’oxygène de rentrer. Sur le plan de l’hygiène, l’inox est parfait, mais il est aussi 100% étanche. En plus, il a une charge opposée à la charge du vin, ce qui en fait un réducteur actif. La réduction (l’inverse de l’oxydation, ndlr) est un défaut fréquent du vin. En résumé, si je mets mon vin dans une cuve en inox, il va manquer d’oxygène et puer le renfermé trois mois plus tard. Quand on travaille avec l’inox, il faut soutirer le vin plusieurs fois au cours de l’élevage pour l’aérer et éliminer les dépôts indésirables. Il y a alors un risque d’oxydation, surtout quand on n’a pas mis de sulfites.
Les jarres en terre cuite ne permettent pas un échange d’oxygène. D’une porosité moindre, les jarres en argile cuites à des températures de 800-900° autorisent l’air de rentrer comme les barriques. Sauf qu’on ne connait jamais la provenance de l’argile. De plus, au niveau des métaux, ce n’est pas toujours très joli. Presque tous les vins en amphore (grand vase en terre cuite, ndlr) contiennent de l’aluminium. Il y en a même qui contiennent des taux de cadmium et de métaux lourds très élevés. Le béton, c’est encore pire ! Les fours à ciment sont de grandes déchèteries. Tout se passe à haute température, alors tous les déchets dont on veut se débarrasser partent à la cimenterie.
Le seul matériau qui reste, c’est le polyéthylène. On peut le nettoyer très facilement et les bactéries ne peuvent pas s’y installer. Il permet une micro-oxygénation comme les barriques, mais il n’y a pas de perte de jus qui serait due au soutirage. Comme il permet à l’air de rentrer, on peut parfaitement fermer ses fûts sans s’en inquiéter. Tout se met en place et s’aère doucement. Le polyéthylène est un produit génial. Alors oui, c’est du plastique. Mais si seulement tout le monde pouvait utiliser le plastique à bon escient… C’est un produit technologique qui a de la valeur, sauf quand on l’utilise pour emballer 500 g de viande ; j’ai un problème avec le plastique à usage unique. Mes fûts, je les utiliserai jusqu’au moment où ils se dégradent.
Je vise la praticité en fermant mes bouteilles à l’aide de capsules et non de bouchons en liège. Ça me frappe de voir qu’on adhère toujours à ce type de bouchon. C’est une fermeture de merde, quelque chose du Moyen-Âge dont on n’a plus besoin. Les brasseurs utilisent des capsules depuis plus d’un siècle et tout va bien ! Dans les caves champenoises, ils laissent vieillir leurs vins sur lattes pendant 12 ans avec une capsule pour ensuite la retirer lors du dégorgement et mettre un putain de bouchon de liège. Sur 100 bouteilles, au moins 5 seront bouchonnées. Il faut accepter le changement. La capsule est peut-être moins sexy qu’un bouchon en liège aux yeux de certains, mais je trouve mes bouteilles zens, pratiques et belles. La capsule à vis est également une bonne fermeture, mais plus coûteuse.
Mes vins sont à 11-12,5% d’alcool. J’ai même des monocépages qui montent à 15%. Mes parcelles ont développé une certaine typicité basée sur le sol et surtout sur la diversité des cépages. Chaque parcelle représente une cuvée et contient entre quatre et huit cépages différents. Je me fous que ce soit du rouge ou du blanc ! Si je vendange 50% de rouge, j’en ferai du vin rouge. Et quand il y en a un peu moins, alors il sera plutôt rouge léger ou rosé foncé. J’ai voulu reproduire dans mon rouge des notes de vins orange : noix, abricots, fruits blancs. Ça a été une surprise totale, mes vins sont assez floraux et aromatiques. J’ai commencé avec environ 500 bouteilles. Maintenant, j’en suis à 6 300. Mon but est d’arriver entre 15 000 et 20 000.
N’écoute pas les autres. Fais ce que tu veux. Surtout quand tu dégustes du vin. Prends-le dans le nez et dans la bouche juste en te demandant : qu’est-ce que je sens ? Et non : qu’est-ce que je dois retrouver ? Pour moi, une vraie dégustation, ce n’est pas avec des sommeliers, c’est avec des gens qui ne connaissent rien sur le vin. Tu leur donnes à manger, tu mets plein de bouteilles sur la table et tu regardes les bouteilles vides après le repas. Ça, c’est le vin qui leur a plu .
De quelle manière cultives-tu le vin ?
Une culture, c’est forcément une manipulation de la nature. Mais j’essaie de la manipuler le moins possible. Je laisse la nature faire les choses et tout va bien dans la plupart des cas. Les plantes ne sont pas en compétition. Beaucoup de vignerons pensent qu’il faut détruire les plantes qui sont sous la vigne, sans quoi elle ne pourrait pas pousser. Mais la vigne est une plante costaud ! Les agriculteurs et maraîchers usent et abusent des pesticides (insecticides, fongicides, herbicides, ndlr). Or, une fois que la vigne prend, il n’y a plus de souci à se faire. Mes vins de 2022 sont actuellement en cuve. Ceux de 2021 sont déjà épuisés, je n’en avais pas beaucoup, les étourneaux ont mangé 75% de ma production. Ça fait partie des aléas.
Les labours en profondeur constituent un autre problème. Les machines, toujours plus puissantes, détruisent la structure naturelle de la terre qui héberge de nombreux êtres vivants. Petit à petit, toute cette vie se dégrade. Même la terre n’est plus capable de capter l’eau. Si on arrêtait de labourer les sols, on restituerait cette biodiversité.
En quoi te différencies-tu des autres vignerons (culture) ?
Je ne travaille pas avec des cépages classiques, j’utilise un croisement entre différentes variétés. La plupart des vignerons s’appuient sur des vignes des 17 e et 18 e siècles. C’est débile car elles sont pleines de pesticides. En France, la surface viticole couvre à peine 3% de toute la surface agricole, mais elle représente 40 à 50% des traitements fongicides ! La solution ? Replanter de nouvelles vignes, mais ça demande une certaine audace. Mais ça paie. Économiquement parlant, ça ne sert à rien de fabriquer un produit qu’on trouve déjà partout.
Tu peux nous en dire plus sur ton mode de vinification ?
Je vinifie et j’élève mes cuvées dans des contenants en plastique en forme d’œufs. Quand je parle de plastique à mes collègues du monde du vin nature, ça les rend dingues, surtout les biodynamistes. Le bois est un produit naturel, mais les amateurs de vins nature n’apprécient pas forcément les arômes boisés. Puis les forêts sont en train de disparaître, on ne retrouve plus de chênes de 400 ans. Les barriques y sont pour quelque chose, ça me gêne. Sans parler des bretts (les brettanomyces dites « bretts » sont des levures de contamination, ndlr) ou d’autres bactéries qui s’installent dans les vieilles barriques.
La fibre de verre aurait pu être une option, mais elle est trop étanche et ne permet pas à l’oxygène de rentrer. Sur le plan de l’hygiène, l’inox est parfait, mais il est aussi 100% étanche. En plus, il a une charge opposée à la charge du vin, ce qui en fait un réducteur actif. La réduction (l’inverse de l’oxydation, ndlr) est un défaut fréquent du vin. En résumé, si je mets mon vin dans une cuve en inox, il va manquer d’oxygène et puer le renfermé trois mois plus tard. Quand on travaille avec l’inox, il faut soutirer le vin plusieurs fois au cours de l’élevage pour l’aérer et éliminer les dépôts indésirables. Il y a alors un risque d’oxydation, surtout quand on n’a pas mis de sulfites.
Les jarres en terre cuite ne permettent pas un échange d’oxygène. D’une porosité moindre, les jarres en argile cuites à des températures de 800-900° autorisent l’air de rentrer comme les barriques. Sauf qu’on ne connait jamais la provenance de l’argile. De plus, au niveau des métaux, ce n’est pas toujours très joli. Presque tous les vins en amphore (grand vase en terre cuite, ndlr) contiennent de l’aluminium. Il y en a même qui contiennent des taux de cadmium et de métaux lourds très élevés. Le béton, c’est encore pire ! Les fours à ciment sont de grandes déchèteries. Tout se passe à haute température, alors tous les déchets dont on veut se débarrasser partent à la cimenterie.
Le seul matériau qui reste, c’est le polyéthylène. On peut le nettoyer très facilement et les bactéries ne peuvent pas s’y installer. Il permet une micro-oxygénation comme les barriques, mais il n’y a pas de perte de jus qui serait due au soutirage. Comme il permet à l’air de rentrer, on peut parfaitement fermer ses fûts sans s’en inquiéter. Tout se met en place et s’aère doucement. Le polyéthylène est un produit génial. Alors oui, c’est du plastique. Mais si seulement tout le monde pouvait utiliser le plastique à bon escient… C’est un produit technologique qui a de la valeur, sauf quand on l’utilise pour emballer 500 g de viande ; j’ai un problème avec le plastique à usage unique. Mes fûts, je les utiliserai jusqu’au moment où ils se dégradent.
Tu fermes tes bouteilles à l’aide de capsules.
Je vise la praticité en fermant mes bouteilles à l’aide de capsules et non de bouchons en liège. Ça me frappe de voir qu’on adhère toujours à ce type de bouchon. C’est une fermeture de merde, quelque chose du Moyen-Âge dont on n’a plus besoin. Les brasseurs utilisent des capsules depuis plus d’un siècle et tout va bien ! Dans les caves champenoises, ils laissent vieillir leurs vins sur lattes pendant 12 ans avec une capsule pour ensuite la retirer lors du dégorgement et mettre un putain de bouchon de liège. Sur 100 bouteilles, au moins 5 seront bouchonnées. Il faut accepter le changement. La capsule est peut-être moins sexy qu’un bouchon en liège aux yeux de certains, mais je trouve mes bouteilles zens, pratiques et belles. La capsule à vis est également une bonne fermeture, mais plus coûteuse.
Comment qualifierais-tu tes vins ?
Mes vins sont à 11-12,5% d’alcool. J’ai même des monocépages qui montent à 15%. Mes parcelles ont développé une certaine typicité basée sur le sol et surtout sur la diversité des cépages. Chaque parcelle représente une cuvée et contient entre quatre et huit cépages différents. Je me fous que ce soit du rouge ou du blanc ! Si je vendange 50% de rouge, j’en ferai du vin rouge. Et quand il y en a un peu moins, alors il sera plutôt rouge léger ou rosé foncé. J’ai voulu reproduire dans mon rouge des notes de vins orange : noix, abricots, fruits blancs. Ça a été une surprise totale, mes vins sont assez floraux et aromatiques. J’ai commencé avec environ 500 bouteilles. Maintenant, j’en suis à 6 300. Mon but est d’arriver entre 15 000 et 20 000.
Un dernier pour la route ?
N’écoute pas les autres. Fais ce que tu veux. Surtout quand tu dégustes du vin. Prends-le dans le nez et dans la bouche juste en te demandant : qu’est-ce que je sens ? Et non : qu’est-ce que je dois retrouver ? Pour moi, une vraie dégustation, ce n’est pas avec des sommeliers, c’est avec des gens qui ne connaissent rien sur le vin. Tu leur donnes à manger, tu mets plein de bouteilles sur la table et tu regardes les bouteilles vides après le repas. Ça, c’est le vin qui leur a plu .