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Trafic de drogue : « La mort d’une enfant ne nous empêchera pas d’en consommer encore »

([Société] 2023-01-01 (De Morgen))


« Vous avez le sang d’une fillette de 11 ans sur les mains. » Les utilisateurs des réseaux sociaux sont nombreux à pointer du doigt les consommateurs de cocaïne. Le Premier ministre, Alexander De Croo, n’y est pas non plus allé par quatre chemins en dénonçant ceux qui font vivre le trafic de stupéfiants. Mais se sentent-ils coupables ? « Ça ne nous empêchera pas de sniffer notre rail. »

« Tout consommateur de cocaïne est moralement complice du meurtre d’une petite fille de 11 ans. #TakeThat », a twitté Marc Fauconnier, expert en communication, avant que le ministre CD&V Vincent Van Peteghem et le Premier ministre Alexander De Croo (Open VLD) lui emboîtent le pas : « Les consommateurs peuvent vraiment se regarder dans le miroir. Pas d’offre sans demande. Tout le monde doit comprendre que la consommation de drogues fait couler du sang, aussi innocentes semblent-elles aux yeux de certains. Les trafics engendrent des coûts énormes pour notre société, ce que nous ne pouvons pas accepter. »

Hypocrisie



Des dealers et consommateurs de coke, occasionnels ou dépendants, ont lu les messages. Si la mort d’une enfant innocente ne laisse personne de marbre, se sentent-ils coupables et ont-ils envie de changer leur comportement ? Les réponses de divers consommateurs font bien comprendre que non. « J’ai réfléchi au moment de lire la nouvelle, mais si le week-end prochain, à une fête, quelqu’un me propose un petit rail, je n’y penserai plus », réagit un homme de la quarantaine, père par ailleurs. C’est un consommateur occasionnel : « Le gaz que nous importons fait aussi couler du sang, quand même. Vous trouverez peut-être cela cru, mais personnellement, ce n’est pas mon problème. Regardez les pays d’origine : la Colombie, le Mexique… D’autres morts tomberont encore, ce n’était pas la dernière. »

[1]Une enfant morte à Anvers : donnons-nous les moyens de lutter contre les narcotrafiquants

Un dealer de trente ans, dans le Brabant flamand : « Ce n’est pas la première fois que ce genre de choses arrive. Toutes ces bombes et ces grenades, ces dernières semaines à Anvers… Mais maintenant qu’une enfant est morte, le sujet est devenu plus sensible. Et tout à coup, on s’intéresse aux consommateurs ? Quelle hypocrisie ! »

L’homme en est convaincu : les consommateurs ne s’empêcheront pas de sniffer leur petit rail. « Et moi non plus. Qui plus est, je remarque que la demande augmente. De nombreux consommateurs sont trop dépendants. Ils ne se préoccupent pas de cette question. Avons-nous, en tant que consommateurs, une responsabilité dans cette affaire ? Non. Des dizaines de milliers d’autres morts ont eu lieu avant celle de cette petite fille. Au Mexique, dans les ports d’attache du trafic de cocaïne, tant de personnes sont mortes pour cette drogue. C’est une industrie qui pèse plusieurs milliards. Elle ne s’arrêtera pas pour la mort d’une enfant . »

La coke présente dans toutes les professions



Un ouvrier de 27 ans de Termonde – passé de consommateur sporadique à accro en passant par la case dealer pour redevenir consommateur occasionnel – se montre un peu plus nuancé : « Je lis la presse tous les jours, et la mort de cette fille me désole. En sommes-nous complices ? En partie, oui, évidemment, parce que nous achetons de la cocaïne. Tout est lié, mais si sa famille a été visée, ce n’est pas pour rien. L’enfant, bien sûr, n’y est pour rien, mais son frère aurait tout aussi bien pu être touché par cette balle. Et lui, il a été en contact avec le milieu. Si tel avait été le cas, les médias et les politiques auraient-ils réagi aussi promptement ? Se seraient-ils mis à nous attaquer sur les réseaux sociaux ? Non, je ne pense pas . »

« Ce qui s’est passé est grave, mais en tant que consommateur, je ne me sens pas coupable, poursuit-il. Je n’ai pas d’enfants, et en sniffant, je ne nuis qu’à moi-même. À personne d’autre. Pour les jeunes gens de vingt à trente ans, la cocaïne est une drogue festive. Et des fêtes, il y en a tous les jours. Ce n’est pas facile de renverser la tendance. Des consommateurs, on en trouve dans tous les quartiers et dans tous les métiers. J’en ai vendu à des bourgmestres, à des docteurs, et même à des policiers. La dispersion est trop grande. Et sanctionner davantage les consommateurs n’y fera rien. La responsabilité se situe surtout dans le camp du politique, pas seulement chez nous. »

[2]Violences liées à la drogue : pourquoi continuer à appliquer des remèdes inefficaces?



[1] https://daardaar.be/rubriques/politique/une-enfant-morte-a-anvers-donnons-nous-les-moyens-de-lutter-contre-les-narcotrafiquants/

[2] https://daardaar.be/rubriques/societe/violences-liees-a-la-drogue-pourquoi-continuer-a-appliquer-des-remedes-inefficaces/



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