À Cannes, des Ukrainiens demandent une exclusion totale des Russes: “Ce n’est pas juste”
(2022-05-20_11-48-29 (Avec AFP))
- Reference: 2022-05-20_11-48-29_a-cannes-des-ukrainiens-demandent-une-ex
- News link: https://www.7sur7.be/cinema/a-cannes-des-ukrainiens-demandent-une-exclusion-totale-des-russes-ce-nest-pas-juste~a7218d81/
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"Êtes-vous prêts à effacer Tchekhov, Dostoïevski, Tolstoï et d'autres génies russes ?", a réagi auprès de l'AFP le cinéaste critique du régime russe Kirill Serebrennikov, tout en disant "comprendre" les Ukrainiens qui se sont émus de sa présence à Cannes. Sa montée des marches mercredi pour présenter son nouveau long-métrage "La femme de Tchaïkovski", en lice pour la Palme d'or, a suscité de vives critiques de la part de représentants de cinéastes ukrainiens, qui ont appelé à "effacer" "tout ce qui est russe".
"D'abord, je dois dire que je comprends pourquoi ils disent ce qu'ils disent. Je comprends qu'ils sont dans une situation terrible, que des gens perdent leur vie, leur maison (...) Pour eux, c'est même difficile d'entendre la langue russe. Je comprends très bien ça", a réagi auprès de l'AFP le réalisateur de "Leto" (2018) et "La fièvre de Petrov" (2021).
[1]
Le documentaire d'un cinéaste tué en Ukraine bouscule Cannes
[2]
Zelensky s'adresse à Cannes: “Il nous faut un nouveau Chaplin qui prouvera que le cinéma n’est pas muet” face à la guerre
"Mais couper tout ce qui est Russe serait une grande erreur et je suis heureux que le Festival de Cannes ait choisi la bonne solution", ajoute-t-il.
Le Festival de Cannes avait, dès fin mars, annoncé qu'il bannirait les cinéastes russes proches du pouvoir mais ne fermerait pas la porte aux cinéastes critiques envers le régime. Quelques semaines plus tard, son délégué général, Thierry Frémaux, avait indiqué que l'Ukraine serait "dans tous les esprits" durant le festival, avec notamment plusieurs films ukrainiens programmés.
Citation
“Êtes-vous prêts à effacer Tchekhov, Dostoïevski, Tolstoï et d'autres génies russes?”
Une position saluée par le réalisateur de 52 ans, qui estime qu'il ne faut pas "bannir des gens à cause de leur nationalité". "Êtes-vous prêts à effacer Tchekhov, Dostoïevski, Tolstoï et d'autres génies russes? Ce n'est pas juste. Il n'est pas juste de bannir des gens à cause de leur nationalité", a-t-il répété.
Connu pour ses créations iconoclastes, son soutien aux personnes LGBT+ et sa critique indirecte du régime de Poutine, Kirill Serebrennikov, qui ouvrira en juillet le Festival d'Avignon, est pour la troisième fois en compétition à Cannes.
Il n'avait, jusqu'ici, jamais pu se rendre au Festival de Cannes pour ses films en compétition, la justice russe l'ayant interdit de sortir du territoire, dans le cadre d'une affaire de détournement de fonds.
Sans être un opposant ou un dissident, il a toujours publiquement pris position contre le rétrécissement des libertés en Russie ou les guerres menées par le Kremlin à l'étranger, et a participé à des manifestations. [3]Mercredi, il a appelé à la fin de la guerre en Ukraine à la fin de la projection officielle de son film .
“Je suis absolument convaincu que la culture et les gens de la culture sont capables de faire en sorte que cette guerre cesse” en Ukraine, a-t-il poursuivi, sous des applaudissements nourris, entouré de ses acteurs à l’issue de la projection qui ouvrait la compétition cannoise.
“Elle va arriver cette fin, elle va arriver à un moment et ce sera la paix”, a-t-il ajouté, caché derrière ses lunettes de soleil.
Des représentants du cinéma ukrainien ont demandé jeudi à Cannes l’exclusion totale des films russes à l’international, y compris ceux de Kirill Serebrennikov. “Nous pensons vraiment que tout ce qui est russe doit être effacé”, a indiqué à l’AFP Andrew Fesiak, producteur ukrainien de films, lors d’une conférence sur la “propagande russe”, hébergée par le pavillon américain au Marché du film.
“Les cinéastes russes ne peuvent pas prétendre que tout va bien et qu’ils n’ont rien à se reprocher”, a-t-il affirmé, “au moment où les cinéastes ukrainiens sont forcés d’arrêter de faire des films parce qu’ils doivent, ou fuir pour sauver leur vie, ou prendre les armes”.
Au sujet de la présence en compétition du film “La femme de Tchaïkovski”, il a estimé que son réalisateur “Serebrennikov n’est pas un opposant, pas du tout”, rappelant que “toute sa carrière a été financée par l’argent du gouvernement russe”.
Le principal intéressé a précisé à l’AFP que son film a été financé “par des entreprises indépendantes russes” ainsi que par “des fonds européens”. “On me pose la question du rôle d’Abramovitch (oligarque russe) qui détient un des fonds qui a financé mon film. Abramovitch, c’est quelqu’un qui a beaucoup aidé les projets d’art contemporain, les ONG (...) et c’est quelqu’un qui a été dans les négociations entre l’Ukraine et la Russie”, a-t-il expliqué.
Sur la même ligne que d’autres grands événements culturels mondiaux, le délégué général du festival Thierry Frémaux a défendu lundi devant les journalistes l’idée d’accueillir des dissidents russes: “il y a des Russes artistes, journalistes, qui ont quitté la Russie. Kirill Serebrennikov est un homme qui a considéré que s’il ne quittait pas la Russie, il se rendait complice de cette guerre”.
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Thierry Frémaux avec Tom Cruise lors de la projection de Top Gun: Maverick ce mercredi. © REUTERS
Également metteur en scène, Serebrennikov est désormais installé à Berlin. Il avait affirmé à l’AFP fin avril avoir quitté sa Russie natale pour une question de “conscience”.
M. Frémaux avait précisé lundi que l’idée d’un “boycott total” avait été demandée “non pas par les autorités ukrainiennes, mais par des ultras, des gens qui sont très radicaux”. “C’est une position que je peux comprendre (...) parce que ce sont des gens qui sont sous les bombes”, avait-il reconnu.
Dans une tribune du Monde, Alexandre Rodnianski, producteur de cinéma ukrainien qui a travaillé vingt ans en Russie, s’est insurgé contre l’idée d’un “boycott”, assurant que “les sélections des plus grands festivals de cinéma ont toujours inclus les témoignages honnêtes sur l’état actuel des choses en Russie” et que “dans la vie de ceux qui ont commis le massacre de Boutcha, le rôle de la culture était plus que minime. C’est la télévision propagandiste qui les a élevés”.
“Aujourd’hui, seule l’authentique culture russe peut servir d’appui pour aider à changer le pays”, a conclu Rodnianski.
[1] https://www.7sur7.be/cinema/le-documentaire-d-un-cineaste-tue-en-ukraine-bouscule-cannes~a4b9f702/
[2] https://www.7sur7.be/cinema/zelensky-s-adresse-a-cannes-il-nous-faut-un-nouveau-chaplin-qui-prouvera-que-le-cinema-nest-pas-muet-face-a-la-guerre~aeae5e33/
[3] https://www.7sur7.be/cinema/non-a-la-guerre-le-realisateur-russe-serebrennikov-prend-position-a-cannes~a340eb50/
"D'abord, je dois dire que je comprends pourquoi ils disent ce qu'ils disent. Je comprends qu'ils sont dans une situation terrible, que des gens perdent leur vie, leur maison (...) Pour eux, c'est même difficile d'entendre la langue russe. Je comprends très bien ça", a réagi auprès de l'AFP le réalisateur de "Leto" (2018) et "La fièvre de Petrov" (2021).
Lire aussi
[1]
Le documentaire d'un cinéaste tué en Ukraine bouscule Cannes
[2]
Zelensky s'adresse à Cannes: “Il nous faut un nouveau Chaplin qui prouvera que le cinéma n’est pas muet” face à la guerre
"Mais couper tout ce qui est Russe serait une grande erreur et je suis heureux que le Festival de Cannes ait choisi la bonne solution", ajoute-t-il.
Le Festival de Cannes avait, dès fin mars, annoncé qu'il bannirait les cinéastes russes proches du pouvoir mais ne fermerait pas la porte aux cinéastes critiques envers le régime. Quelques semaines plus tard, son délégué général, Thierry Frémaux, avait indiqué que l'Ukraine serait "dans tous les esprits" durant le festival, avec notamment plusieurs films ukrainiens programmés.
Citation
“Êtes-vous prêts à effacer Tchekhov, Dostoïevski, Tolstoï et d'autres génies russes?”
Soutien à la communauté LGBT+
Une position saluée par le réalisateur de 52 ans, qui estime qu'il ne faut pas "bannir des gens à cause de leur nationalité". "Êtes-vous prêts à effacer Tchekhov, Dostoïevski, Tolstoï et d'autres génies russes? Ce n'est pas juste. Il n'est pas juste de bannir des gens à cause de leur nationalité", a-t-il répété.
Connu pour ses créations iconoclastes, son soutien aux personnes LGBT+ et sa critique indirecte du régime de Poutine, Kirill Serebrennikov, qui ouvrira en juillet le Festival d'Avignon, est pour la troisième fois en compétition à Cannes.
Il n'avait, jusqu'ici, jamais pu se rendre au Festival de Cannes pour ses films en compétition, la justice russe l'ayant interdit de sortir du territoire, dans le cadre d'une affaire de détournement de fonds.
“Non à la guerre”, a-t-il lancé après la projection de son film
Sans être un opposant ou un dissident, il a toujours publiquement pris position contre le rétrécissement des libertés en Russie ou les guerres menées par le Kremlin à l'étranger, et a participé à des manifestations. [3]Mercredi, il a appelé à la fin de la guerre en Ukraine à la fin de la projection officielle de son film .
“Je suis absolument convaincu que la culture et les gens de la culture sont capables de faire en sorte que cette guerre cesse” en Ukraine, a-t-il poursuivi, sous des applaudissements nourris, entouré de ses acteurs à l’issue de la projection qui ouvrait la compétition cannoise.
“Elle va arriver cette fin, elle va arriver à un moment et ce sera la paix”, a-t-il ajouté, caché derrière ses lunettes de soleil.
“Nous pensons vraiment que tout ce qui est russe doit être effacé”
Des représentants du cinéma ukrainien ont demandé jeudi à Cannes l’exclusion totale des films russes à l’international, y compris ceux de Kirill Serebrennikov. “Nous pensons vraiment que tout ce qui est russe doit être effacé”, a indiqué à l’AFP Andrew Fesiak, producteur ukrainien de films, lors d’une conférence sur la “propagande russe”, hébergée par le pavillon américain au Marché du film.
“Les cinéastes russes ne peuvent pas prétendre que tout va bien et qu’ils n’ont rien à se reprocher”, a-t-il affirmé, “au moment où les cinéastes ukrainiens sont forcés d’arrêter de faire des films parce qu’ils doivent, ou fuir pour sauver leur vie, ou prendre les armes”.
Au sujet de la présence en compétition du film “La femme de Tchaïkovski”, il a estimé que son réalisateur “Serebrennikov n’est pas un opposant, pas du tout”, rappelant que “toute sa carrière a été financée par l’argent du gouvernement russe”.
Le principal intéressé a précisé à l’AFP que son film a été financé “par des entreprises indépendantes russes” ainsi que par “des fonds européens”. “On me pose la question du rôle d’Abramovitch (oligarque russe) qui détient un des fonds qui a financé mon film. Abramovitch, c’est quelqu’un qui a beaucoup aidé les projets d’art contemporain, les ONG (...) et c’est quelqu’un qui a été dans les négociations entre l’Ukraine et la Russie”, a-t-il expliqué.
Serebrennikov a quitté sa Russie natale pour une question de “conscience”
Sur la même ligne que d’autres grands événements culturels mondiaux, le délégué général du festival Thierry Frémaux a défendu lundi devant les journalistes l’idée d’accueillir des dissidents russes: “il y a des Russes artistes, journalistes, qui ont quitté la Russie. Kirill Serebrennikov est un homme qui a considéré que s’il ne quittait pas la Russie, il se rendait complice de cette guerre”.
Lire la suite sous l’image
Thierry Frémaux avec Tom Cruise lors de la projection de Top Gun: Maverick ce mercredi. © REUTERS
Également metteur en scène, Serebrennikov est désormais installé à Berlin. Il avait affirmé à l’AFP fin avril avoir quitté sa Russie natale pour une question de “conscience”.
M. Frémaux avait précisé lundi que l’idée d’un “boycott total” avait été demandée “non pas par les autorités ukrainiennes, mais par des ultras, des gens qui sont très radicaux”. “C’est une position que je peux comprendre (...) parce que ce sont des gens qui sont sous les bombes”, avait-il reconnu.
Rodnianski, producteur de cinéma ukrainien, contre un boycott total
Dans une tribune du Monde, Alexandre Rodnianski, producteur de cinéma ukrainien qui a travaillé vingt ans en Russie, s’est insurgé contre l’idée d’un “boycott”, assurant que “les sélections des plus grands festivals de cinéma ont toujours inclus les témoignages honnêtes sur l’état actuel des choses en Russie” et que “dans la vie de ceux qui ont commis le massacre de Boutcha, le rôle de la culture était plus que minime. C’est la télévision propagandiste qui les a élevés”.
“Aujourd’hui, seule l’authentique culture russe peut servir d’appui pour aider à changer le pays”, a conclu Rodnianski.
NOTRE DOSSIER SUR LE FESTIVAL DE CANNES
[1] https://www.7sur7.be/cinema/le-documentaire-d-un-cineaste-tue-en-ukraine-bouscule-cannes~a4b9f702/
[2] https://www.7sur7.be/cinema/zelensky-s-adresse-a-cannes-il-nous-faut-un-nouveau-chaplin-qui-prouvera-que-le-cinema-nest-pas-muet-face-a-la-guerre~aeae5e33/
[3] https://www.7sur7.be/cinema/non-a-la-guerre-le-realisateur-russe-serebrennikov-prend-position-a-cannes~a340eb50/