Fabrice veut aider les Ukrainiens, mais on refuse de renouveler son passeport: il dénonce le “double jeu” des autorités belges
(2022-05-12_08-00-00)
- Reference: 2022-05-12_08-00-00_fabrice-veut-aider-les-ukrainiens-mais-o
- News link: https://www.7sur7.be/belgique/fabrice-veut-aider-les-ukrainiens-mais-on-refuse-de-renouveler-son-passeport-il-denonce-le-double-jeu-des-autorites-belges~abdd46fc/
- Source link:
Fabrice, un Belge expatrié en France, est actuellement en Pologne, à la frontière avec l’Ukraine, pour venir en aide aux réfugiés qui fuient la guerre. Jusqu’alors, il avait un passeport qui lui permettait de circuler entre la Pologne et l’Ukraine, mais celui-ci est à présent périmé. Malgré ses demandes de renouvellement auprès de l’ambassade belge à Varsovie, on refuse de lui renouveler ses papiers. Pour le bénévole, c’est une terrible désillusion, car, empêché de passer la frontière, il ne peut plus aider les Ukrainiens comme il le faisait jusqu’alors. Il dénonce le “double jeu” des autorités belges.
Il y a peu, Fabrice a perdu son papa. Un événement bouleversant qui l’a poussé à prendre une année sabbatique. Année qu’il a décidé de mettre à profit en donnant de son temps aux Ukrainiens. “La population vit un exode massif. C’est une question à laquelle j’ai été sensibilisé très jeune par mon père, car lui aussi a fui la guerre. Avec ma grand-mère, il a dû quitter la région du Luxembourg belge pour l’Ardèche”, explique-t-il.
Citation
La Belgique nous demande d’être solidaires, mais quand on veut l’être, on nous met des bâtons dans les roues. Fabrice, Bénévole pour le Convoi de la Solidarité
Depuis Colmar, où il est domicilié, le Belge d’origine est parti à Medyka, en Pologne, dans les jours qui ont suivi l’invasion russe en Ukraine. Depuis son stand situé à seulement 200 mètres de la frontière, il aide les Ukrainiens en transit et apportait même des vivres dans le pays voisin. Mais ça, c’était avant. Depuis le 25 mars, le passeport de Fabrice est périmé. Ce qui signifie que s’il se rend en Ukraine, il le fait illégalement. Le bénévole du [1]Convoi de la Solidarité a bien tenté de renouveler son passeport en Pologne, auprès de l’ambassade de Belgique à Varsovie, mais sa requête lui a été refusée. “Pour ce genre de motif, à savoir pour aller en Ukraine, l’ambassade de Varsovie ne traite plus les dossiers. Officiellement, c’est pour des raisons de sécurité”, indique-t-il. “Mais je ne suis pas d’accord avec ça, car les voyages en Ukraine ne sont pas interdits, à ce que je sache. Je connais les risques, c’est ma volonté d’aider.”
Selon le bénévole, il ne serait pas le seul Belge à avoir fait face à ce refus. Et d’autres ressortissants, notamment Français et Allemands, se seraient également vu refuser leur renouvellement de passeport pour des raisons similaires. “Le but est évidemment de nous faire rentrer chez nous”, commente Fabrice. “Les convois humanitaires d’organisations civiles sont à présent empêchés à la frontière, mais pas les organisations de grosse envergure sous l’égide des États”, regrette-t-il.
(Poursuivre l’article ci-dessous)
Depuis plus de deux mois, qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige, Fabrice dort dans une tente sur le campement de Medyka. Il y restera tant que ses moyens le lui permettront. © D.R.
L’homme se demande à quoi jouent les autorités belges et dénonce un “double jeu”. “La Belgique nous demande d’être solidaires, mais quand on veut l’être, on nous met des bâtons dans les roues”, fustige-t-il. Pourtant, Fabrice explique avoir reçu un badge officiel d’aidant pour l’Ukraine, accordé par les autorités polonaises. Pour lui, c’est incompréhensible: “J’ai mis entre parenthèses ma vie personnelle pour aider ces pauvres gens...”
Fabrice pourrait très bien se passer de passeport. Après tout, la Pologne fait partie de l’Union européenne et sa carte d’identité lui suffit pour se déplacer dans le pays tout en aidant les Ukrainiens. Mais selon lui, il lui est absolument nécessaire de passer la frontière, car de moins en moins d’Ukrainiens arrivent en Pologne. “C’est à présent à l’aide d’aller vers eux, vers ceux qui ont décidé de rester en Ukraine malgré la guerre”, explique-t-il. “Là-bas, il y a des magasins, mais le peuple n’a plus les moyens de s’acheter quoi que ce soit. Même les produits de première nécessité sont devenus trop chers, donc c’est à nous, bénévoles, de les leur apporter. On a beaucoup de matériel, de la nourriture, des médicaments que nous devons impérativement livrer dans les villages ukrainiens.”
Comme on lui refuse ce renouvellement de passeport, la seule solution pour Fabrice serait de retourner en Belgique ou en France pour introduire une nouvelle demande. “Mais cela me coûterait du temps et aussi beaucoup d’argent - le trajet plus éventuellement une demande accélérée de renouvellement à plus de 200 euros -. Tout ce temps et cet argent, je préfère les mettre à profit pour aider les Ukrainiens ici”, indique Fabrice.
(Poursuivre l’article ci-dessous)
Une partie du campement de Medyka où Fabrice travaille comme bénévole pour le Convoi de la Solidarité. © D.R.
Du côté des Affaires étrangères, on nous répond que les demandes de renouvellement de passeport doivent obligatoirement être introduites auprès de l’ambassade belge dans le pays où le citoyen est domicilié, ou en Belgique. “Lorsque l’on se trouve à l’étranger, à savoir là où l’on n’est pas domicilié, une demande d’urgence pour un passeport provisoire peut être introduite. Mais cela concerne uniquement les cas où un citoyen a perdu ou s’est fait voler son passeport. Et ce passeport ne doit servir qu’à retourner en Belgique, ou dans son pays de résidence. Donc pas pour voyager”, indique Marie Cherchari, porte-parole aux Affaires étrangères.
“Je ne connais pas les motifs exacts qui justifient le refus de l’ambassade à Varsovie, mais cela semble être lié à une demande en urgence qui n’est pas nécessaire”, poursuit la porte-parole. “Il faut aussi admettre que le contexte en Ukraine est particulier. Par précaution, l’ambassade doit rappeler les règles d’usage et appeler à la précaution.”
Selon les Affaires étrangères, l’avis négatif qu’a reçu Fabrice n’est donc pas un refus catégorique. Simplement, le type de document demandé ne serait pas le bon. Et effectivement, c’est bien un passeport provisoire que Fabrice a demandé aux autorités belges. Mais est-ce bien là la seule raison du refus? Dans sa réponse officielle, adressée à Fabrice et que nous avons pu consulter, l’ambassade à Varsovie indique également ceci: “Malheureusement, nous devons fortement déconseiller les voyages en Ukraine. Votre sécurité n’est pas garantie et nous ne pouvons pas fournir d’assistance consulaire.” Pour l’expatrié, c’est tout simplement scandaleux. Il hésite d’ailleurs à demander une déchéance de nationalité.
[1] https://convoidelasolidarite.org/
Il y a peu, Fabrice a perdu son papa. Un événement bouleversant qui l’a poussé à prendre une année sabbatique. Année qu’il a décidé de mettre à profit en donnant de son temps aux Ukrainiens. “La population vit un exode massif. C’est une question à laquelle j’ai été sensibilisé très jeune par mon père, car lui aussi a fui la guerre. Avec ma grand-mère, il a dû quitter la région du Luxembourg belge pour l’Ardèche”, explique-t-il.
Citation
La Belgique nous demande d’être solidaires, mais quand on veut l’être, on nous met des bâtons dans les roues. Fabrice, Bénévole pour le Convoi de la Solidarité
Depuis Colmar, où il est domicilié, le Belge d’origine est parti à Medyka, en Pologne, dans les jours qui ont suivi l’invasion russe en Ukraine. Depuis son stand situé à seulement 200 mètres de la frontière, il aide les Ukrainiens en transit et apportait même des vivres dans le pays voisin. Mais ça, c’était avant. Depuis le 25 mars, le passeport de Fabrice est périmé. Ce qui signifie que s’il se rend en Ukraine, il le fait illégalement. Le bénévole du [1]Convoi de la Solidarité a bien tenté de renouveler son passeport en Pologne, auprès de l’ambassade de Belgique à Varsovie, mais sa requête lui a été refusée. “Pour ce genre de motif, à savoir pour aller en Ukraine, l’ambassade de Varsovie ne traite plus les dossiers. Officiellement, c’est pour des raisons de sécurité”, indique-t-il. “Mais je ne suis pas d’accord avec ça, car les voyages en Ukraine ne sont pas interdits, à ce que je sache. Je connais les risques, c’est ma volonté d’aider.”
Pas le seul
Selon le bénévole, il ne serait pas le seul Belge à avoir fait face à ce refus. Et d’autres ressortissants, notamment Français et Allemands, se seraient également vu refuser leur renouvellement de passeport pour des raisons similaires. “Le but est évidemment de nous faire rentrer chez nous”, commente Fabrice. “Les convois humanitaires d’organisations civiles sont à présent empêchés à la frontière, mais pas les organisations de grosse envergure sous l’égide des États”, regrette-t-il.
(Poursuivre l’article ci-dessous)
Depuis plus de deux mois, qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige, Fabrice dort dans une tente sur le campement de Medyka. Il y restera tant que ses moyens le lui permettront. © D.R.
L’homme se demande à quoi jouent les autorités belges et dénonce un “double jeu”. “La Belgique nous demande d’être solidaires, mais quand on veut l’être, on nous met des bâtons dans les roues”, fustige-t-il. Pourtant, Fabrice explique avoir reçu un badge officiel d’aidant pour l’Ukraine, accordé par les autorités polonaises. Pour lui, c’est incompréhensible: “J’ai mis entre parenthèses ma vie personnelle pour aider ces pauvres gens...”
L’aide doit se déplacer
Fabrice pourrait très bien se passer de passeport. Après tout, la Pologne fait partie de l’Union européenne et sa carte d’identité lui suffit pour se déplacer dans le pays tout en aidant les Ukrainiens. Mais selon lui, il lui est absolument nécessaire de passer la frontière, car de moins en moins d’Ukrainiens arrivent en Pologne. “C’est à présent à l’aide d’aller vers eux, vers ceux qui ont décidé de rester en Ukraine malgré la guerre”, explique-t-il. “Là-bas, il y a des magasins, mais le peuple n’a plus les moyens de s’acheter quoi que ce soit. Même les produits de première nécessité sont devenus trop chers, donc c’est à nous, bénévoles, de les leur apporter. On a beaucoup de matériel, de la nourriture, des médicaments que nous devons impérativement livrer dans les villages ukrainiens.”
Comme on lui refuse ce renouvellement de passeport, la seule solution pour Fabrice serait de retourner en Belgique ou en France pour introduire une nouvelle demande. “Mais cela me coûterait du temps et aussi beaucoup d’argent - le trajet plus éventuellement une demande accélérée de renouvellement à plus de 200 euros -. Tout ce temps et cet argent, je préfère les mettre à profit pour aider les Ukrainiens ici”, indique Fabrice.
(Poursuivre l’article ci-dessous)
Une partie du campement de Medyka où Fabrice travaille comme bénévole pour le Convoi de la Solidarité. © D.R.
Pas un refus, juste un avis négatif
Du côté des Affaires étrangères, on nous répond que les demandes de renouvellement de passeport doivent obligatoirement être introduites auprès de l’ambassade belge dans le pays où le citoyen est domicilié, ou en Belgique. “Lorsque l’on se trouve à l’étranger, à savoir là où l’on n’est pas domicilié, une demande d’urgence pour un passeport provisoire peut être introduite. Mais cela concerne uniquement les cas où un citoyen a perdu ou s’est fait voler son passeport. Et ce passeport ne doit servir qu’à retourner en Belgique, ou dans son pays de résidence. Donc pas pour voyager”, indique Marie Cherchari, porte-parole aux Affaires étrangères.
“Je ne connais pas les motifs exacts qui justifient le refus de l’ambassade à Varsovie, mais cela semble être lié à une demande en urgence qui n’est pas nécessaire”, poursuit la porte-parole. “Il faut aussi admettre que le contexte en Ukraine est particulier. Par précaution, l’ambassade doit rappeler les règles d’usage et appeler à la précaution.”
Selon les Affaires étrangères, l’avis négatif qu’a reçu Fabrice n’est donc pas un refus catégorique. Simplement, le type de document demandé ne serait pas le bon. Et effectivement, c’est bien un passeport provisoire que Fabrice a demandé aux autorités belges. Mais est-ce bien là la seule raison du refus? Dans sa réponse officielle, adressée à Fabrice et que nous avons pu consulter, l’ambassade à Varsovie indique également ceci: “Malheureusement, nous devons fortement déconseiller les voyages en Ukraine. Votre sécurité n’est pas garantie et nous ne pouvons pas fournir d’assistance consulaire.” Pour l’expatrié, c’est tout simplement scandaleux. Il hésite d’ailleurs à demander une déchéance de nationalité.
[1] https://convoidelasolidarite.org/