Melissa Depraetere (Vooruit), ministre flamande du Logement, est enceinte. Il va de soi que nous lui souhaitons beaucoup de bonheur et de courage pour ce marathon physique que nous avons tendance à sous-estimer. Mais ce qui me ravit surtout, c’est le fait que cette grossesse a permis de faire bouger les lignes pour toutes les ministres-mères à venir. Pour la première fois dans l’histoire du pays, une ministre se fera remplacer pendant son congé de maternité.

Bien sûr, jadis, il n’était pas évident de demander un remplacement à part entière lorsqu’on était l’une des seules (jeunes) femmes du gouvernement. En 2010, Freya Van den Bossche avait subi les foudres du parlement, qui lui reprochait une absence trop longue après l’accouchement. Quelques années plus tard, Zuhal Demir, alors secrétaire d’État fédérale à l’Égalité des chances, n’a plus été critiquée. Les temps ont changé et le gouvernement flamand s’est fortement féminisé. Comme l’a déclaré Melissa Depraetere en personne, cette fois-ci, les hommes sont même en minorité et ils ont tout à fait soutenu la proposition de remplacement provisoire de la ministre. Si elle n’a pas eu à craindre la réaction du ministre-président Matthias Diependaele, régulièrement forcé de nourrir sa petite famille à la friterie du coin, il n’en a pas toujours été ainsi. On a coutume de se plaindre des privilèges réservés aux politiques, et en effet, on pourrait épargner un peu sur ce plan-là. Mais souvent, on leur en refuse un : la possibilité de rester dans sa bulle avec son nouveau-né. Un moment dans la vie d’une mère travailleuse (ou d’un père d’ailleurs) parfois difficile à obtenir sans tracas. Mais aujourd’hui, pour « bébé Depraetere », la Flandre y pourvoit.

[1]Qui est Matthias Diependaele, le «Thatcher flamand» pressenti comme ministre-président?

Le débat fait rage au niveau européen également, où un remplacement provisoire peut encore causer des soucis aux députées en raison des règlements électoraux. Dans l’attente d’un progrès significatif, le Parlement européen a approuvé une proposition visant à faire voter par procuration les députées enceintes ou ayant récemment accouché. Fini donc, pour elles, de venir voter en plénière avec un nouveau-né sur les genoux.

Dans son accord de gouvernement, l’exécutif fédéral a prévu de mettre fin à une absurdité subsistant à l’échelon local. Jusqu’il y a peu, une conseillère communale en congé de maternité ne pouvait pas se rendre au conseil communal avant trois mois, sous peine de perdre ses allocations de maternité. Les membres du parti de Petra Mesuere, conseillère communale à Knokke-Heist, ont mis à contribution leur réseau bruxellois pour tirer la sonnette d’alarme à un moment crucial de la formation du gouvernement. Après des amendements de Vooruit et de la N-VA, la proposition de loi portée par Nathalie Muylle (CD&V) est quasiment prête pour le vote. Aux conseillères communales enceintes : encore un peu de patience !

[2]Du mal de dos au burn-out : guide de premiers secours pour jeunes parents

Rien ne change tout seul. C’est pourquoi il est crucial que de futures mères — surtout si elles occupent une fonction importante et disposent d’un accès aux médias — arrachent ces droits. Avec l’aide d’hommes modernes et le soutien de mères qui se rappellent encore bien les obstacles qu’elles ont eu à surmonter. La route est encore longue, mais si des femmes de pouvoir s’emparent sans remords de ce à quoi elles ont droit, à terme, cela bénéficiera à toutes les femmes.



[1] https://daardaar.be/rubriques/politique/qui-est-matthias-diependaele-le-thatcher-flamand-pressenti-comme-ministre-president/

[2] https://daardaar.be/rubriques/societe/du-mal-de-dos-au-burn-out-guide-de-premiers-secours-pour-jeunes-parents/