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Cultuurculture : quel bilan après 10 ans de projets qui brisent la barrière linguistique?

([Culture et Médias] 2025-10-01 (DaarDaar))


Et si, pour percer sur la scène culturelle internationale, la meilleure porte d’entrée se trouvait… de l’autre côté de la frontière linguistique ? Depuis dix ans, le programme Cultuurculture rapproche artistes et opérateurs culturels flamands et francophones. L’occasion de faire le point sur une décennie de collaboration.

Tout commence le 7 décembre 2012, [1]lorsque la Communauté flamande et la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) signent un accord de coopération culturelle . Trois ans plus tard, en 2015, les premiers appels à projets sont lancés. Depuis, 448 projets ont été déposés et 152 soutenus.

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Derrière ces chiffres, des initiatives très diverses. Jeanne Brunfaut, administratrice générale de la culture à la FWB, cite par exemple [2]le festival pluridisciplinaire Next entre Lille, Courtrai et Tournai, l’extension du [3]Museumpass à de nouveaux publics ou encore [4]MusicFund , qui organise des formations pour réparer des instruments dans les deux communautés.

En 2023, DaarDaar, le site francophone qui propose le meilleur de la presse flamande en français, et son partenaire néerlandophone Ons Erfdeel ont également été retenus. Ensemble, ils ont produit une série de reportages vidéo sur la frontière linguistique.

Plus de visibilité internationale



En septembre dernier, près de 150 acteurs culturels des deux communautés se sont retrouvés à Flagey pour célébrer les dix ans de cette coopération. La journée a été rythmée par des rencontres, une table ronde et de nombreux échanges.

Parmi les duos présents à la table ronde : Marie du Chastel, directrice artistique du KIKK Festival à Namur, et Kurt D’Haeseleer, directeur artistique de Werktank, plateforme de production de Louvain. Ensemble, leurs organisations ont remporté deux appels à projets de Cultuurculture.

Leur projet » Air, lumière, matière / Lucht, licht, materie « , soutenu en 2022, a réuni les artistes Haseeb Ahmed et Laurie-Anne Jaubert pour explorer les éléments naturels à travers la lumière, le vent et la matière.

Exposée pour la première fois au KIKK Festival, l’œuvre The Library of the Winds de Haseeb Ahmed a ensuite voyagé en Espagne et en France, attirant des curateurs internationaux notamment grâce aux liens noués avec des festivals comme And& de Louvain.

» Ce lien étroit permet aussi aux artistes flamands exposés au KIKK d’être ensuite visibles sur la scène française, grâce à la présence d’un grand nombre de professionnels hexagonaux au festival « , souligne Marie du Chastel.

Pour Kurt D’Haeseleer, la complémentarité structurelle avec le KIKK Festival permet de donner une vie plus longue aux œuvres, d’atteindre des festivals étrangers et de créer un vrai impact : » Pour les lieux à l’étranger, c’est plus riche, parce qu’il y a une plus grande variation. Quand on présente un travail de Belgique sous un même ensemble, on est plus fort. »

Des communautés plus proches qu’on ne le pense



La culture fut l’une des premières compétences défédéralisées en Belgique dans les années 1970. Depuis, les communautés culturelles du nord et du sud ont largement évolué dans leurs propres sphères. Pourtant, les collaborations intercommunautaires peuvent s’avérer plus simples et naturelles que les partenariats avec la France ou les Pays-Bas.

» Avec la Flandre, les artistes sont basés en Belgique, les budgets peuvent être mutualisés et les distances courtes favorisent échanges et résidences. À l’inverse, les collaborations avec la France demandent plus de moyens et de coordination « , explique Marie du Chastel du KIKK Festival.

Kurt D’Haeseleer renchérit : » Souvent, je me sens plus proche des Bruxellois francophones ou des Wallons que des Hollandais. » Et surtout, leurs approches se complètent : » Werktank est plutôt dans la production et KIKK dans la présentation. C’est très utile, car souvent un festival ne paie que pour montrer l’œuvre, pas pour la produire « , poursuit le directeur de Werktank.

Cette complémentarité permet de donner une vie plus longue aux œuvres, d’atteindre des festivals étrangers et de renforcer l’impact des projets, assure Marie du Chastel : » Le partenariat est devenu structurel, avec la présentation régulière d’artistes soutenus par Werktank au KIKK Festival et des échanges professionnels constants. »

[5]Musée flamand d’art contemporain : Gand détrône Anvers, à la surprise générale

Une coopération à renforcer



[6]Une enquête menée auprès des bénéficiaires des appels à projets confirme l’intérêt du programme : la grande majorité souhaite poursuivre l’expérience. De son côté, Marie du Chastel est convaincue que ces appels à projets offrent un cadre unique pour amorcer des collaborations qui, autrement, n’auraient pas existé : « Globalement, ces appels ont créé un réseau professionnel solide et pérenne entre la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Flandre, fondé sur la confiance et la circulation continue d’artistes et de projets. »

Il ressort toutefois de cette enquête que les opérateurs demandent plus de temps et de souplesse dans les calendriers ainsi que davantage de moments de réseautage.

« Il faudrait que la collaboration ne s’arrête pas au bout d’un an, mais qu’on puisse vraiment construire quelque chose sur le long terme. »

En parallèle, les critiques reviennent souvent sur la taille des enveloppes (entre 5000 et 10.000 euros par partenaire pour un budget annuel total de 300.000 euros) et sur le caractère trop ponctuel du soutien. » Il faudrait que la collaboration ne s’arrête pas au bout d’un an, mais qu’on puisse vraiment construire quelque chose sur le long terme « , lance Kurt D’Haeseleer.

Jeanne Brunfaut souligne un autre défi : la visibilité. » Faute de moyens, le budget se concentre sur les projets eux-mêmes, si bien que le dispositif reste assez connu des professionnels, mais largement invisible pour le grand public. »

Et la suite ?



Toutes les personnes interrogées s’accordent à dire que Cultuurculture doit continuer, et même s’amplifier. Selon Jeanne Brunfaut, la plateforme de coopération interculturelle devrait se poursuivre à l’avenir : « Les ministres francophone et néerlandophone de la culture s’entendent bien et ont un grand intérêt à poursuivre le travail. Ce serait dommage d’aller multiplier des partenariats avec le reste du monde sans penser au fait qu’on a des partenaires qui sont juste à côté. »

En compétition avec Namur et Molenbeek, c’est finalement Louvain qui a été élue capitale européenne de la culture en 2030. Kurt D’Haeseleer, impliqué dans un projet lié à cette candidature, avoue avoir failli rater la nouvelle : » C’est Marie qui m’a envoyé un message pour me féliciter. J’avais complètement oublié la conférence de presse… »

Une anecdote révélatrice : en Belgique, le plus court chemin vers l’international peut aussi d’abord passer par… l’autre communauté.

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[1] https://www.rtbf.be/article/francophones-et-flamands-ont-conclu-un-accord-de-cooperation-culturelle-7888760

[2] https://nextfestival.eu/fr

[3] https://www.museumpassmusees.be/fr

[4] https://musicfund.eu/

[5] https://daardaar.be/rubriques/culture-et-medias/musee-flamand-dart-contemporain-gand-detrone-anvers-a-la-surprise-generale/

[6] https://www.cultuurculture.be/spotlight/10-ans-de-soutien-la-coopration-culturelle-10-jaar-ondersteuningculturele-samenwerking



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