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Tourisme à Fourons : la baisse des subsides flamands relance la querelle linguistique

([Société] 2025-10-01 (Het Belang Van Limburg))


Avec plus de 200 000 nuitées enregistrées l’an dernier, Fourons demeure une destination touristique très prisée. Pourtant, le gouvernement flamand a décidé de réduire fortement son soutien financier au tourisme dans cette commune à facilités du Limbourg, provoquant ainsi des licenciements, semant l’incertitude et ravivant la crainte que les tensions linguistiques qui traversent la région ne resurgissent.

La décision de la ministre flamande du Tourisme, Melissa Depraetere (Vooruit), a suscité un vif émoi. Elle réduit drastiquement les moyens de fonctionnement de Toerisme Voerstreek, une asbl qui n’est pas un service communal et dépend essentiellement d’une subvention non structurelle de la Région flamande, complétée par des cotisations et une aide de 40 000 euros de la commune.

Ce qui choque particulièrement, c’est la manière dont la décision a été annoncée : par simple lettre. « Nous n’étions pas au courant et n’avons jamais été consultés. C’est une décision unilatérale, prise sans la moindre concertation préalable », s’indigne Huub Broers, ancien bourgmestre de Fourons et président de l’association. « Nous avons été pris de court, d’autant que la précédente ministre, Zuhal Demir (N-VA), avait encore consenti une hausse temporaire du subside. » Car la région des Fourons reste très appréciée des randonneurs et cyclistes : l’an dernier, 212 000 nuitées y ont été enregistrées, et 15 % des habitants travaillent dans le tourisme.

Des licenciements déjà effectifs



Il ressort d’une question parlementaire de la députée flamande An Christiaens (CD&V) qu’en 2024, l’asbl percevait encore 173 000 euros par l’intermédiaire de Toerisme Vlaanderen. En 2027, ce montant ne sera plus que de 38 000 euros. Les effets se font déjà sentir. « Deux des quatre employés ont été licenciés. C’est un coup dur. On attend tout de même d’une ministre socialiste qu’elle fasse preuve de sensibilité sociale », s’agace Joris Gaens, bourgmestre (Voerbelangen) de la commune et membre du conseil d’administration de Toerisme Voerstreek. « Sans décision politique rapide pour maintenir cette subvention, nous ne pourrons plus payer les deux salariés restants dès décembre. La commune compte 4 400 habitants : nous n’avons tout simplement pas les moyens de créer un service communal du tourisme. »

De son côté, la ministre se défend en rappelant que Toerisme Voerstreek a longtemps bénéficié d’un soutien exceptionnel. « C’était la seule région à recevoir des aides supplémentaires pour le développement et la promotion du tourisme. Nous mettons fin à ce traitement particulier, car le tourisme relève en réalité des communes, villes et organismes provinciaux », explique-t-elle. « L’association pourra néanmoins continuer à solliciter Toerisme Vlaanderen via les appels à projets, comme toutes les autres régions. »

La querelle linguistique en filigrane



L’objectif affiché de la ministre est donc d’instaurer une égalité de traitement. Mais pour An Christiaens, cet argument ne tient pas. « Fourons a un statut particulier, on ne peut la comparer aux autres communes. Si l’association chargée du tourisme bénéficiait de ce soutien, c’est parce qu’elle en avait vraiment besoin. Ce coup de rabot est une erreur qui affaiblit la position de la Flandre dans la région. »

Et c’est là que réside le véritable enjeu : cette réduction ne menace pas seulement l’économie locale, elle fragilise aussi l’identité flamande de Fourons. Car cette enclave verdoyante du Limbourg est divisée depuis des décennies par la question linguistique. L’asbl Toerisme Voerstreek existe depuis longtemps, mais a adopté sa forme indépendante actuelle il y a 25 ans, en réaction à la majorité pro-wallonne de l’époque. Depuis 2000, c’est le parti local Voerbelangen qui est majoritaire, tandis que les francophones sont dans l’opposition.

« La plus grande erreur que la Flandre puisse commettre est de penser que, cette majorité étant constituée, tout va bien et tout ira bien demain. C’est se mettre le doigt dans l’œil », met en garde Huub Broers. « Si Toerisme Voerstreek venait à disparaître, il ne serait pas surprenant que les opérateurs du secteur touristique se tournent vers des organismes francophones pour prendre le relais. »

[1]Tensions communautaires : un climat de guerre froide

Précisons qu’en tant que commune à facilités, Fourons ne peut pas fusionner avec une autre pour rationaliser ses coûts. « Ici, l’enseignement et la culture dépendent de la province et de la Région flamande. Il est indispensable que le tourisme bénéficie aussi de cette exception », estime Huub Broers.

Sans compter que l’opposition francophone compte un échevin élu directement qui dispose d’un droit de veto sur certaines décisions. Si Toerisme Voerstreek devenait un service communal, cet échevin pourrait alors soumettre certains dossiers au conseil communal. « Les conséquences seraient extrêmement négatives. C’est pourquoi il est crucial que l’association reste indépendante », insiste Huub Broers. « Concrètement, nous demandons une subvention de base de 128 000 euros par an pour assurer le fonctionnement de l’association et payer les deux salariés. »

Une rencontre attendue avec le ministère



Le bourgmestre, Joris Gaens, espère qu’une concertation aura lieu rapidement. « Voilà six mois que nous demandons à rencontrer le cabinet de la ministre. À ce stade nous avons seulement échangé des messages sur WhatsApp et eu quelques appels téléphoniques. Je le déplore profondément », ajoute-t-il. La ministre promet désormais une véritable rencontre avec Toerisme Vlaanderen. « C’est prévu à court terme », précise-t-elle. Reste à voir si elle sera sensible aux arguments de l’asbl. « Si la ministre croit aux Fourons, qu’elle le prouve par des moyens structurels », conclut An Christiaens.

[2][Vidéo] Le conflit linguistique vit-il toujours dans les Fourons?



[1] https://daardaar.be/rubriques/tensions-communautaires-un-climat-de-guerre-froide/

[2] https://daardaar.be/rubriques/societe/video-le-conflit-linguistique-vit-il-toujours-dans-les-fourons/



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