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  ARM Give a man a fire and he's warm for a day, but set fire to him and he's warm for the rest of his life (Terry Pratchett, Jingo)

Israël à l’Eurovision: le deux poids deux mesures des organisateurs

([Culture et Médias, Opinions] 2025-05-01 (Het Nieuwsblad))


Le coup d’envoi du « cirque de l’Eurovision » a été donné hier à Bâle. Allons droit au but : la participation d’Israël pose problème. Non pas sa représentante, mais le fait que le pays soit autorisé à concourir. Et c’est précisément la veille du lancement des festivités en Suisse qu’est publié un nouveau rapport sur la situation à Gaza. Selon un organisme sur laquelle s’appuie l’Organisation des Nations unies, quelque 2,1 millions de personnes y sont menacées de famine. Les photos d’enfants décharnés sont atroces. Israël bloque l’aide humanitaire depuis le début du mois de mars afin de faire pression sur le Hamas pour qu’il libère les otages. Et voilà un an et demi que le moindre mouvement, dans cette fine bande de terre, entraîne des bombardements qui réduisent tout en cendres.

De son côté, l’organisateur de l’événement, l’Union européenne de radiotélévision (UER), ne considère pas que la participation d’Israël soit un problème. Il estime, au contraire, que bannir ce pays serait un acte politique. Ce point de vue vaut la peine qu’on s’y attarde. Car lorsqu’elle a envahi l’Ukraine, la Russie a bien été exclue du concours — à bon droit, puisque cette démarche s’inscrivait dans la « politique apolitique » que pratiquait jadis l’UER. Lorsqu’un pays se montrait agressif à l’égard d’un voisin ou d’une minorité ethnique, il était interdit de participation. Une limite posée pour la première fois dans les années 1990, lorsque l’ex-Yougoslavie fut bannie en raison du massacre en Bosnie.

Si l’on appliquait les mêmes critères qu’à l’époque, Israël aurait été rayé de la liste des participants, peut-être déjà lors de l’édition précédente, et sans aucun doute cette année, à présent que le pays fait savoir, par toutes les abominations possibles, qu’il entend occuper tout le territoire de Gaza. Le Concours de la chanson a toujours été un moment de propagande politique pour le Premier ministre israélien, et l’UER a de nouveau le petit doigt sur la couture du pantalon. La politique de tolérance de l’UER envers Israël tient probablement surtout au principal sponsor de l’événement : Moroccanoil. Que l’on ne s’y trompe pas : malgré son nom, il s’agit d’une société israélienne qui produit de l’huile de noix en Cisjordanie occupée, région que les vautours israéliens d’extrême droite qui peuplent le gouvernement Netanyahou ambitionnent d’annexer, à l’instar de Gaza.

La chanson de Yuval Raphael a toute sa place dans la soupe insipide que nous sert généralement l’Eurovision, où les contributions de la Belgique sont toujours à l’avenant. Mais la décision de l’UER d’autoriser Israël à y participer gâche la fête. Ce concours se voulait un moment de fraternité entre Européens, placé sous le signe de la musique, avec une touche de nationalisme réduite aux drapeaux brandis dans les airs. Une soirée que les millions de fans passent devant leur télé à grand renfort de chips et d’alcool. Loin des tracas causés par les turbulences qui secouent le monde. Mais désormais, il faut être aveugle et sourd, ou refuser de voir la dure réalité, comme l’UER, pour encore pouvoir profiter de l’Eurovision l’esprit tranquille.

A relire (archive de 2019)

[1]Faut-il ou non boycotter le concours Eurovision en Israël ?



[1] https://daardaar.be/rubriques/culture-et-medias/faut-il-ou-non-boycotter-le-concours-eurovision-en-israel/



Against stupidity the very gods Themselves contend in vain.
-- Friedrich von Schiller, "The Maid of Orleans", III, 6