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  ARM Give a man a fire and he's warm for a day, but set fire to him and he's warm for the rest of his life (Terry Pratchett, Jingo)

Union Saint-Gilloise: un sacre qui met tout un système en échec

([Opinions, Sport] 2025-05-01 (De Morgen))


Il y a une très bonne raison de ne pas se réjouir du titre de champion décroché par l’Union Saint-Gilloise. Accessoirement, il y en a aussi une moins bonne.

Commençons par la moins bonne, car elle est en partie subjective. L’Union n’est pas la formation de l’élite qui propose le jeu le plus attrayant et il faut remonter à l’année de son retour en D1A pour poser le même constat. Énormément de petites fautes en milieu de terrain, un tirage de maillot par-ci, un petit coup par-là, une poussée juste là où il faut pour éviter qu’elle soit sanctionnée, etc.

C’est avec ce football qu’au printemps 2021, l’USG réintègre la première division sous la houlette de Felice Mazzu. Le jeu unioniste sera ensuite amélioré sous Karel Geraerts et Alexander Blessin, puis perfectionné avec Sébastien Pocognoli à la barre. Et c’est ainsi que quatre ans après une promotion obtenue quasi contre toute attente, l’Union décroche le titre, de façon un peu moins surprenante cette fois.

Dire que l’Union « ne pratique pas le plus beau jeu de l’élite » est une affirmation en partie subjective. Chacun se bat avec les armes dont il dispose et à l’Union, cet arsenal est, pour de nombreuses raisons – voir ci-dessous –, plus limité que celui que possèdent les cadors, autoproclamés ou non, de notre championnat. Cet argument n’est donc pas recevable.

La seule véritable bonne raison de ne pas se réjouir du titre de l’Union concerne son propriétaire mais ici aussi, on peut avancer beaucoup d’arguments pour et contre. C’est la première fois qu’un club belge avec un propriétaire étranger décroche le titre de champion. Depuis 2018, l’Union appartient en effet à Alex Muzio et Tony Bloom. Au moment de son rachat, le club évoluait encore en deuxième division. Muzio et Bloom possédaient déjà le club anglais de Premier League Brighton & Hove Albion et géraient par ailleurs l’entreprise de paris sportifs Starlizard. Encore une bonne raison d’exprimer des réserves à propos du propriétaire de l’USG.

Amour du club



Que les choses soient claires, cependant : cette question du propriétaire n’a pas manqué de faire l’objet de « chipotages ». En 2023/24, Brighton et l’Union se qualifient tous deux pour l’Europa League. Comme l’UEFA interdit à des clubs détenus par un même propriétaire de concourir dans une même compétition, Muzio remplace Bloom, vers la moitié de l’année 2023, en tant qu’actionnaire majoritaire du club du parc Duden.

Le titre que vient de décrocher l’Union est également le premier pour un club belge faisant partie d’une construction MCO (Multiple Club Ownership). Une telle construction est très populaire mais également très controversée, car les motivations de ceux qui sont propriétaires ou actionnaires majoritaires de plusieurs clubs ne sont en rien liées à l’amour du club, mais bien au commerce lucratif de joueurs.

Ce business est l’unique raison pour laquelle Bloom et Muzio ont atterri à Bruxelles plutôt qu’à Arnhem, par exemple, alors que cette ville des Pays-Bas possède ou possédait elle aussi depuis des années un club moribond, avec qui plus est un beau stade. Bien sûr, la Belgique est un pays stable et la Jupiler Pro League un championnat difficile mais ce qui intéressait surtout Bloom et Muzio, c’étaient les conditions pour faire du commerce de joueurs, parmi les meilleures d’Europe.

A relire

[1]Un footballeur au Parlement européen

En Belgique, une assiette d’avantages fiscaux et parafiscaux existe en effet pour les jeunes footballeurs alors qu’un étranger non ressortissant de l’UE peut être recruté et revendu, mais aussi écarté et licencié sans véritable seuil salarial. En 2024, l’Union a réalisé un chiffre d’affaires de 67,8 millions, dont 35 millions provenaient de la vente de joueurs.

Priver des étrangers du droit de faire du commerce de joueurs serait bien entendu hypocrite alors qu’il s’agit de l’activité principale des clubs belges du top. Nous accueillerons dès lors le titre de l’Union à bras ouverts, notamment parce qu’après rendu tous les soi-disant clubs du top jaloux grâce à une gestion des ressources humaines avisée et ingénieuse, ce petit club s’est définitivement payé leur tête et leur scalp avant-hier.

Le titre que viennent de remporter les Saint-Gillois est un camouflet pour tout le football belge, mais il l’est en premier lieu pour le voisin anderlechtois, dont le chiffre d’affaires est le double de celui de l’Union et qui dispose d’un vrai stade et non d’une enceinte en ruine. On doit également être dans ses petits souliers du côté du Racing Genk, de Gand, du Standard et de l’Antwerp, tous des clubs qui ont été champions à une ou plusieurs reprises avant de toucher des dizaines de millions grâce à la Ligue des champions, mais qui n’ont en fin de compte pas profité de ce magot pour franchir un palier. À cet égard, il sera intéressant de voir comment l’Union gérera le pactole d’au moins de 40 millions d’euros qu’elle percevra.

Roulés dans la farine par deux parieurs

Mais c’est surtout du côté du Club de Bruges et des génies autoproclamés qui dirigent ce club, son président Bart Verhaeghe en tête, que le réveil a dû être douloureux hier matin. Le football a beau avoir ancré le principe de l’équilibre compétitif, comment expliquer que sur un championnat comportant pas moins de quarante journées, un club puisse se faire damer le pion par un rival qui lui concède cent (100 !) millions d’euros en matière de chiffre d’affaires ?

Comment expliquer qu’un club qui emploie 200 collaborateurs se fasse battre par un adversaire qui n’en occupe que 84 ? Qui en est de surcroît à son quatrième entraîneur en autant de saisons et qui, l’an dernier, a contracté un crowdlending afin de pouvoir payer ses impôts à l’avance et d’ainsi bénéficier d’une réduction ? Qui, enfin, est dans le ventre mou de la D1 en ce qui concerne les salaires qu’il offre et qui présente un ratio coûts salariaux/chiffre d’affaires inférieur à 50 pour cent ?

Si l’on tient compte de ces différents paramètres, tous les grands clubs belges seront forcés de conclure qu’ils se sont fait rouler dans la farine par deux parieurs, et ce n’est pas le genre de constatation qui redore votre blason !

A relire

[2]Terrains plus petits, ballons plus légers: faut-il changer les règles du football féminin?



[1] https://daardaar.be/rubriques/sport/un-footballeur-au-parlement-europeen/

[2] https://daardaar.be/rubriques/sport/terrains-plus-petits-ballons-plus-legers-faut-il-changer-les-regles-du-football-feminin/



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