Bpost est en grève depuis 10 jours. Ou plus précisément : le personnel wallon de bpost a décidé de se croiser les bras. La ministre de tutelle, Vanessa Matz (Les Engagés), réagit prudemment, en bonne ex-chrétienne démocrate : « La Wallonie a une autre approche des conflits sociaux que la Flandre. Je n’en dirai pas plus. »

Factuellement, les travailleurs wallons se plaignent de rythmes de travail trop élevés. Visiblement, leurs collègues flamands y résistent mieux. Le CEO de bpost, le Flamand Kris Peeters, prend moins de pincettes que Matz : « Les grévistes réclamaient déjà avant les réformes, ils ne savent pas de quoi il retourne. Cent mille colis sont passés à la concurrence. Si la grève continue, je n’exclus pas la nécessité d’un plan social. » Pour Peeters, la réorganisation de l’entreprise est logique : il y a de moins en moins de courrier écrit, et la hausse du nombre de colis ne suffit pas à compenser cette diminution.

Ce qui se passe à la poste préfigure ce qui va se jouer ces quatre prochaines années : une résistance plus forte en Wallonie qu’en Flandre contre les projets du gouvernement fédéral. Parce que la Flandre est plus riche et que par conséquent, elle peut se permettre plus facilement des (petites) pertes. Parce que l’aile flamande du gouvernement fédéral se compose d’une formation de gauche (Vooruit), du centre (CD&V) et de droite (N-VA), tandis que les partis de gauche du sud du pays se retrouvent tous dans l’opposition. Mais il y a un autre facteur : Georges-Louis Bouchez.

A relire

[1]Faire grève trop tôt, c’est envoyer un mauvais signal

Comme il n’est pas devenu ministre, le président du MR n’a pas changé d’un iota, comme on pouvait s’y attendre. Il reste prompt à s’exprimer, voire trop prompt, comme il l’a démontré la semaine passée en fulminant contre les syndicalistes : « Ce sont des agitateurs qui foutent le feu à la rue, des kékés avec, parfois, une Cara Pils à la main. » Les syndicats ont évidemment mal digéré la déclaration. Les numéros 1 de la FGTB et de la CSC ont même refusé de débattre avec GLB sur la RTBF. Par ses propos, le président du MR a boosté de manière inespérée l’agitation sociale au sud du pays. Je ne peux m’empêcher de trouver étrange que quelqu’un qui prétend vouloir tout faire pour l’unité de la Belgique donne aux Flamands tous les arguments pour dire : « Il est impossible de réformer quoi que ce soit avec ces Wallons et leur négativité. Scindons ce pays. »

En d’autres mots : restons calmes. Si tout le monde en Wallonie parvient à retrouver le légendaire bon sens belge, tout ira bien. Soit dit en passant : la première manifestation contre BDW 1 a mobilisé 60 000 manifestants, contre 120 000 lors de la première manifestation contre le gouvernement MR-N-VA de Charles Michel en 2014. Autrement dit, la Wallonie comprend que certaines mesures drastiques seront inévitables. La Cara Pils n’a pas fait perdre le sens des réalités chez tout le monde au sud de la frontière linguistique. Nota bene : Cara Pils est une marque du groupe flamand Colruyt, sis à Hal. Encore de l’argent wallon dans les mains des Flamands.

À relire

[2]Préavis de grève à la SNCB: un cadeau inespéré pour le gouvernement De Wever

[3]Grâce à son monopole, Bpost augmente ses tarifs bien au-delà de l’inflation



[1] https://daardaar.be/rubriques/societe/faire-greve-trop-tot-cest-envoyer-un-mauvais-signal/

[2] https://daardaar.be/rubriques/societe/preavis-de-greve-a-la-sncb-un-cadeau-inespere-pour-le-gouvernement-de-wever/

[3] https://daardaar.be/rubriques/economie/grace-a-son-monopole-bpost-augmente-ses-tarifs-bien-au-dela-de-linflation/