Snapchat, porno et harcèlement : les jeunes exposés de plus en plus tôt
([Société] 2025-01-01 (De Morgen))
- Reference: 2025-01_shubham-sharan-1rJdewJPCWE-unsplash-255x170
- News link: https://daardaar.be/rubriques/societe/snapchat-porno-et-harcelement-les-jeunes-exposes-de-plus-en-plus-tot/
- Source link: https://www.demorgen.be/nieuws/moet-u-bezorgd-zijn-dat-uw-kind-in-vieze-snapchat-groepjes-belandt-van-naaktfoto-s-kijken-ze-in-het-vijfde-leerjaar-al-niet-meer-op~b1658321/?referrer=https://www.google.com/
« Hier, nous avons appris que plusieurs élèves de sixième année étaient souvent ajoutés à des groupes Snapchat à leur insu », peut-on lire dans un e-mail envoyé par la direction de l’école primaire Christus Koning, à Bruges, aux parents. Un élève a tiré la sonnette d’alarme, informant un professeur du contenu qui circule dans ces groupes. « Des images à caractère sexuel, clairement inappropriées pour des enfants de cet âge-là, et pouvant même choquer des adultes », indique Ruben Vandendriessche, directeur de l’établissement.
Snapchat est l’un des réseaux sociaux les plus populaires parmi les adolescents, selon le rapport de l’asbl Apestaart. Sur cette application, les photos et vidéos disparaissent peu après leur publication, ce qui complique la supervision parentale. Et pour ne rien arranger, n’importe qui peut ajouter un profil non protégé à un groupe.
Depuis un certain temps, Ruben Vandendriessche constate que ces groupes Snapchat « dégénèrent en harcèlement ou en des conflits violents », et que de jeunes enfants « sont exposés à des contenus qu’ils n’ont pas demandés à voir ». La semaine dernière, des écoles de Flandre occidentale avaient déjà mis en garde contre un groupe Snapchat nommé « Le plus grand groupe de discussion jamais créé », où des images pornographiques étaient diffusées.
« On retrouve également ce genre de groupes sur WhatsApp ou Instagram, et les jeunes y sont parfois confrontés dès l’école primaire », déplore Vere Verhoest, intervenante en éducation sexuelle au sein du centre d’expertise Pimento. Certains groupes comptent des dizaines, voire des centaines de jeunes de la même tranche âge, tandis que d’autres mélangent adolescents et adultes.
[1]Cyberharcèlement : pourquoi les jeunes filment leurs actes de violence?
Ces « groupes spam » ne se limitent pas à la pornographie, ajoute Catherine Van de Heyning, experte en cybercriminalité à l’université d’Anvers. Ils diffusent aussi « des images choquantes de guerre, d’accidents ou de lynchages filmés depuis un téléphone portable ».
Il existe également d’autres vecteurs, comme des comptes TikTok axés sur le commérage où circulent non seulement des rumeurs, mais aussi des photos de nu de jeunes élèves.
L’objectif de ces groupes et l’identité de leurs créateurs restent flous. Ce qui est certain, selon Catherine Van de Heyning, c’est qu’à partir de 10 ou 12 ans, les images échangées deviennent plus crues, avec une prédominance de contenus à caractère sexuel.
Le phénomène a de quoi inquiéter. La sexualité, à l’école primaire, se limite bien souvent à des blagues en dessous de la ceinture, à des dessins d’organes génitaux ou, chez les garçons, à une exploration naissante. « Leur curiosité est grande, mais ils considèrent souvent la sexualité adulte comme étrange ou répugnante », explique une personne travaillant chez Sensoa, le centre d’expertise flamand de la sexualité. La frontière entre les deux mondes est-elle en train de disparaître ?
C’est en tout cas ce que Vere Verhoest remarque : « Dès la cinquième année, les élèves ne sont plus surpris par le sexting ou les photos de nu, même s’ils trouvent ces images choquantes. Et si vous leur demandez s’ils fixeraient des règles pour leurs propres enfants, ils répondent qu’ils ne sont en effet pas censés voir de tels contenus à leur âge ».
[2]Facebook, terrain de chasse privilégié des « groomers »
La tendance ne date pas d’hier. En 2017, le centre d’expertise néerlandais, Rutgers, révélait que deux tiers des enfants de 9 à 12 ans avaient déjà vu des images explicites sur internet, et qu’un tiers avait été confronté à des scènes sexuelles, souvent par accident, via Google ou YouTube.
Les conséquences sur leur développement restent sujettes à débat scientifique. « Cela dépend beaucoup du contexte individuel et du caractère de l’enfant », relève Catherine Van de Heyning. « Certains oublieront l’épisode dès le lendemain, tandis que d’autres pourraient en garder des idées erronées sur la sexualité. »
La « modération laxiste sur les réseaux sociaux » et l’accès de plus en plus jeune aux smartphones ravivent d’autant plus le débat, poursuit Catherine Van de Heyning. Si 59% des élèves de primaire n’ont pas encore de smartphone, l’âge moyen de l’obtention du premier téléphone est désormais de 8 ans, contre 11 ans en 2018.
« Au moment où le premier appareil arrive, l’éducation aux médias fait souvent défaut. Le choix des paramètres de confidentialité n’est pas le bon », précise-t-elle. Les parents ont donc un rôle crucial à jouer, d’autant plus que les écoles primaires imposent maintenant une interdiction générale des smartphones.
« Très souvent, c’est au niveau des paramètres d’applications que le bât blesse. Et les enfants, sans le savoir, ne protègent pas leurs comptes comme il se doit », explique Vere Verhoest. Selon le rapport d’Apestaart, les paramètres de protection de la vie privée ou de gestion des spams sont loin d’être une priorité dans les stratégies de protection des jeunes. « Mais il ne s’agit pas seulement d’ignorance », souligne Vere Verhoest. « Beaucoup de jeunes ouvrent leurs canaux de communication parce qu’ils trouvent cela excitant, tout simplement ».
Cet équilibre précaire entre l’expérimentation et la recherche de sécurité est propre à la jeunesse. Mettre les réseaux sociaux sous cloche – comme c’est souvent le cas dans ce genre d’histoires – n’est pas nécessairement la meilleure solution. « Il est important que les jeunes se forgent une carapace, mais il faut également qu’ils se sentent en sécurité, et qu’ils puissent parler librement de ces sujets-là avec leurs parents ou leurs professeurs », estime-t-elle.
C’est cette démarche qui a été adoptée à Bruges. Outre la sensibilisation des parents, l’école a décidé d’organiser un cours sur la sécurité des comptes sur les réseaux sociaux. Une nécessité, selon la spécialiste : « De cette manière, on montre que l’on prend les jeunes et l’univers dans lequel ils évoluent au sérieux. »
[3]Droit de vote à 16 ans : pourquoi les jeunes ont leur mot à dire
[1] https://daardaar.be/rubriques/societe/cyberharcelement-pourquoi-les-jeunes-filment-leurs-actes-de-violence/
[2] https://daardaar.be/rubriques/opinions/facebook-terrain-de-chasse-privilegie-des-groomers/
[3] https://daardaar.be/rubriques/droit-de-vote-a-16-ans-pourquoi-les-jeunes-ont-leur-mot-a-dire/
Snapchat est l’un des réseaux sociaux les plus populaires parmi les adolescents, selon le rapport de l’asbl Apestaart. Sur cette application, les photos et vidéos disparaissent peu après leur publication, ce qui complique la supervision parentale. Et pour ne rien arranger, n’importe qui peut ajouter un profil non protégé à un groupe.
Phénomène troublant
Depuis un certain temps, Ruben Vandendriessche constate que ces groupes Snapchat « dégénèrent en harcèlement ou en des conflits violents », et que de jeunes enfants « sont exposés à des contenus qu’ils n’ont pas demandés à voir ». La semaine dernière, des écoles de Flandre occidentale avaient déjà mis en garde contre un groupe Snapchat nommé « Le plus grand groupe de discussion jamais créé », où des images pornographiques étaient diffusées.
« On retrouve également ce genre de groupes sur WhatsApp ou Instagram, et les jeunes y sont parfois confrontés dès l’école primaire », déplore Vere Verhoest, intervenante en éducation sexuelle au sein du centre d’expertise Pimento. Certains groupes comptent des dizaines, voire des centaines de jeunes de la même tranche âge, tandis que d’autres mélangent adolescents et adultes.
[1]Cyberharcèlement : pourquoi les jeunes filment leurs actes de violence?
Ces « groupes spam » ne se limitent pas à la pornographie, ajoute Catherine Van de Heyning, experte en cybercriminalité à l’université d’Anvers. Ils diffusent aussi « des images choquantes de guerre, d’accidents ou de lynchages filmés depuis un téléphone portable ».
Il existe également d’autres vecteurs, comme des comptes TikTok axés sur le commérage où circulent non seulement des rumeurs, mais aussi des photos de nu de jeunes élèves.
L’objectif de ces groupes et l’identité de leurs créateurs restent flous. Ce qui est certain, selon Catherine Van de Heyning, c’est qu’à partir de 10 ou 12 ans, les images échangées deviennent plus crues, avec une prédominance de contenus à caractère sexuel.
Une frontière qui tend à disparaître
Le phénomène a de quoi inquiéter. La sexualité, à l’école primaire, se limite bien souvent à des blagues en dessous de la ceinture, à des dessins d’organes génitaux ou, chez les garçons, à une exploration naissante. « Leur curiosité est grande, mais ils considèrent souvent la sexualité adulte comme étrange ou répugnante », explique une personne travaillant chez Sensoa, le centre d’expertise flamand de la sexualité. La frontière entre les deux mondes est-elle en train de disparaître ?
C’est en tout cas ce que Vere Verhoest remarque : « Dès la cinquième année, les élèves ne sont plus surpris par le sexting ou les photos de nu, même s’ils trouvent ces images choquantes. Et si vous leur demandez s’ils fixeraient des règles pour leurs propres enfants, ils répondent qu’ils ne sont en effet pas censés voir de tels contenus à leur âge ».
[2]Facebook, terrain de chasse privilégié des « groomers »
La tendance ne date pas d’hier. En 2017, le centre d’expertise néerlandais, Rutgers, révélait que deux tiers des enfants de 9 à 12 ans avaient déjà vu des images explicites sur internet, et qu’un tiers avait été confronté à des scènes sexuelles, souvent par accident, via Google ou YouTube.
Les conséquences sur leur développement restent sujettes à débat scientifique. « Cela dépend beaucoup du contexte individuel et du caractère de l’enfant », relève Catherine Van de Heyning. « Certains oublieront l’épisode dès le lendemain, tandis que d’autres pourraient en garder des idées erronées sur la sexualité. »
Rôle crucial des parents
La « modération laxiste sur les réseaux sociaux » et l’accès de plus en plus jeune aux smartphones ravivent d’autant plus le débat, poursuit Catherine Van de Heyning. Si 59% des élèves de primaire n’ont pas encore de smartphone, l’âge moyen de l’obtention du premier téléphone est désormais de 8 ans, contre 11 ans en 2018.
« Au moment où le premier appareil arrive, l’éducation aux médias fait souvent défaut. Le choix des paramètres de confidentialité n’est pas le bon », précise-t-elle. Les parents ont donc un rôle crucial à jouer, d’autant plus que les écoles primaires imposent maintenant une interdiction générale des smartphones.
« Très souvent, c’est au niveau des paramètres d’applications que le bât blesse. Et les enfants, sans le savoir, ne protègent pas leurs comptes comme il se doit », explique Vere Verhoest. Selon le rapport d’Apestaart, les paramètres de protection de la vie privée ou de gestion des spams sont loin d’être une priorité dans les stratégies de protection des jeunes. « Mais il ne s’agit pas seulement d’ignorance », souligne Vere Verhoest. « Beaucoup de jeunes ouvrent leurs canaux de communication parce qu’ils trouvent cela excitant, tout simplement ».
Cet équilibre précaire entre l’expérimentation et la recherche de sécurité est propre à la jeunesse. Mettre les réseaux sociaux sous cloche – comme c’est souvent le cas dans ce genre d’histoires – n’est pas nécessairement la meilleure solution. « Il est important que les jeunes se forgent une carapace, mais il faut également qu’ils se sentent en sécurité, et qu’ils puissent parler librement de ces sujets-là avec leurs parents ou leurs professeurs », estime-t-elle.
C’est cette démarche qui a été adoptée à Bruges. Outre la sensibilisation des parents, l’école a décidé d’organiser un cours sur la sécurité des comptes sur les réseaux sociaux. Une nécessité, selon la spécialiste : « De cette manière, on montre que l’on prend les jeunes et l’univers dans lequel ils évoluent au sérieux. »
[3]Droit de vote à 16 ans : pourquoi les jeunes ont leur mot à dire
[1] https://daardaar.be/rubriques/societe/cyberharcelement-pourquoi-les-jeunes-filment-leurs-actes-de-violence/
[2] https://daardaar.be/rubriques/opinions/facebook-terrain-de-chasse-privilegie-des-groomers/
[3] https://daardaar.be/rubriques/droit-de-vote-a-16-ans-pourquoi-les-jeunes-ont-leur-mot-a-dire/