Sven Pichal n’ira pas en prison: une justice trop laxiste?
([Culture et Médias, Opinions] 2024-12-01 (De Morgen))
- Reference: 2024-12_Belgaimage-105700885-255x170
- News link: https://daardaar.be/rubriques/culture-et-medias/sven-pichal-nira-pas-en-prison-une-justice-trop-laxiste/
- Source link: https://www.demorgen.be/meningen/er-rammelt-en-schuurt-wat-aan-de-uitspraak-in-de-zaak-pichal~b7f2a980/
Si les parents étaient chargés de rendre la justice, ils seraient nombreux à penser qu’il n’existe pas de peine assez sévère pour les personnes s’étant livrées à des actes pédophiles ou, comme Sven Pichal, à la consommation et à la diffusion d’images pédopornographiques. En effet, aucun crime ne blesse plus personnellement que la violation de l’intégrité d’enfants sans défense.
On ne s’étonnera donc pas que le jugement rendu dans l’affaire Pichal provoque des réactions passionnées. De nombreuses voix s’élèvent pour critiquer la clémence du tribunal, qui n’a pas prononcé de peine de détention effective. Elles rappellent que d’autres délits, moins graves, sont bel et bien punis d’emprisonnement. Mais les réactions auraient-elles été radicalement différentes si les juges avaient suivi les réquisitions du procureur et condamné Sven Pichal à un an de prison ferme ? D’autres voix se seraient peut-être élevées pour contester une sanction bien trop légère.
C’est par tâtonnements que les États de droit comme le nôtre ont évolué vers un système judiciaire indépendant, dont l’objectif est précisément d’apaiser les passions collectives et d’éviter les excès du tribunal populaire, ce qui représente un progrès. Toutefois, reconnaître et défendre cette avancée n’empêche pas de comprendre les sentiments suscités par un acte particulier.
Le tribunal d’Anvers n’a pas pris cette décision à la légère. Son jugement est mesuré, précis et, à certains égards, même sévère. Quand bien même, on doit pouvoir oser dire — et être autorisé à le faire — que ce verdict crée un malaise.
A relire
[1]5 questions pour comprendre l’affaire Sven Pichal, animateur télé accusé de pédopornographie
La décision des magistrats repose principalement sur l’idée que, pour éviter la récidive, un délinquant comme Sven Pichal doit avant tout suivre un traitement intensif. Il est improbable qu’il puisse le faire en prison, où il pourrait au contraire se retrouver isolé et ainsi rechuter.
Ce raisonnement est certes exact. Pichal se voit imposer des obligations strictes, à juste titre, et offrir une chance de réinsertion. Les jeunes victimes de ces abus atroces — et de leurs images — sont protégées dans la mesure où la récidive est évitée.
Mais ce jugement est troublant en ce sens que le tribunal doit se résigner, par la force des choses, à affirmer que l’emprisonnement fait obstacle au traitement et à la réinsertion. Une contradiction qui ne devrait pas exister. On peut comprendre qu’un juge veuille offrir à un délinquant, après avoir reconnu sa culpabilité, une perspective d’amélioration réaliste. Mais on peut aussi bien comprendre qu’une grande partie de l’opinion publique pense que certains actes sont tellement abominables qu’une peine de privation de liberté s’impose. N’y voyons pas un simple désir de vengeance primaire.
Une fois de plus, le problème réside dans notre système carcéral. La prison cause plus de mal que de bien, elle entraîne trop souvent les détenus vers des profondeurs encore plus abyssales. Ce constat est particulièrement vrai pour le système judiciaire belge, dont les lacunes obligent les magistrats à chercher, de manière réfléchie, des solutions de moindre mal. Or, on doit parfois pouvoir dire, en toute sérénité, que la détention, comme compensation symbolique, peut être un élément de la sanction. Car c’est bien cela qui provoque tant de colère et d’incompréhension.
[1] https://daardaar.be/rubriques/societe/5-questions-pour-comprendre-laffaire-sven-pichal-animateur-tele-accuse-de-pedopornographie/
On ne s’étonnera donc pas que le jugement rendu dans l’affaire Pichal provoque des réactions passionnées. De nombreuses voix s’élèvent pour critiquer la clémence du tribunal, qui n’a pas prononcé de peine de détention effective. Elles rappellent que d’autres délits, moins graves, sont bel et bien punis d’emprisonnement. Mais les réactions auraient-elles été radicalement différentes si les juges avaient suivi les réquisitions du procureur et condamné Sven Pichal à un an de prison ferme ? D’autres voix se seraient peut-être élevées pour contester une sanction bien trop légère.
C’est par tâtonnements que les États de droit comme le nôtre ont évolué vers un système judiciaire indépendant, dont l’objectif est précisément d’apaiser les passions collectives et d’éviter les excès du tribunal populaire, ce qui représente un progrès. Toutefois, reconnaître et défendre cette avancée n’empêche pas de comprendre les sentiments suscités par un acte particulier.
Le tribunal d’Anvers n’a pas pris cette décision à la légère. Son jugement est mesuré, précis et, à certains égards, même sévère. Quand bien même, on doit pouvoir oser dire — et être autorisé à le faire — que ce verdict crée un malaise.
A relire
[1]5 questions pour comprendre l’affaire Sven Pichal, animateur télé accusé de pédopornographie
La décision des magistrats repose principalement sur l’idée que, pour éviter la récidive, un délinquant comme Sven Pichal doit avant tout suivre un traitement intensif. Il est improbable qu’il puisse le faire en prison, où il pourrait au contraire se retrouver isolé et ainsi rechuter.
Ce raisonnement est certes exact. Pichal se voit imposer des obligations strictes, à juste titre, et offrir une chance de réinsertion. Les jeunes victimes de ces abus atroces — et de leurs images — sont protégées dans la mesure où la récidive est évitée.
Mais ce jugement est troublant en ce sens que le tribunal doit se résigner, par la force des choses, à affirmer que l’emprisonnement fait obstacle au traitement et à la réinsertion. Une contradiction qui ne devrait pas exister. On peut comprendre qu’un juge veuille offrir à un délinquant, après avoir reconnu sa culpabilité, une perspective d’amélioration réaliste. Mais on peut aussi bien comprendre qu’une grande partie de l’opinion publique pense que certains actes sont tellement abominables qu’une peine de privation de liberté s’impose. N’y voyons pas un simple désir de vengeance primaire.
Une fois de plus, le problème réside dans notre système carcéral. La prison cause plus de mal que de bien, elle entraîne trop souvent les détenus vers des profondeurs encore plus abyssales. Ce constat est particulièrement vrai pour le système judiciaire belge, dont les lacunes obligent les magistrats à chercher, de manière réfléchie, des solutions de moindre mal. Or, on doit parfois pouvoir dire, en toute sérénité, que la détention, comme compensation symbolique, peut être un élément de la sanction. Car c’est bien cela qui provoque tant de colère et d’incompréhension.
[1] https://daardaar.be/rubriques/societe/5-questions-pour-comprendre-laffaire-sven-pichal-animateur-tele-accuse-de-pedopornographie/